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Vitorino Nemésio
(Terceira, Açores, 19/12/1901 - Lisbonne, 20/02/1978)


vitorino nemesio

 

Vitorino Nemésio était un poète et romancier portugais, né aux Açores. Il a aussi écrit une pièce de théâtre, des biographies, des critiques.
Il a été doyen de la Faculté des Lettres de Lisbonne et président du comité de l'Alliance-Française pour le Portugal.

 

- Gros Temps sur l'archipel (Mau tempo no canal, 1944, traduit du portugais par Denyse Chast). Editions de la Différence, 451 pages. Préface de Vasco Graça Moura. Ce roman est également connu sous le nom de Le Serpent aveugle.

La préface commence ainsi : "Commençons par la fin [...]".
Comme on le voit tout de suite, c'est une très mauvaise préface. Non content d'avoir raconté la fin, Vasco Graça Moura raconte par la suite la totalité de l'histoire, agrémentée de jolies choses, comme "
une incarnation du principe de l'éternel féminin au sens goethéen du mot (das ewige Weibliche)" (page 8), "synecdoque", "analogon", etc.

Il dit quand même une chose très vraie : "
Le livre foisonne de personnages et d'incidents." (page 11).

"
Dans l'ensemble si vaste où Nemésio puise ses richesses, nous pouvons mentionner au hasard le quotidien banal, mais aussi les sciences exactes, l'histoire, la géographie, l'océanographie et toutes les sciences exactes, l'anthropologie, la religion, la tradition, l'art, la littérature, l'oralité populaire et dialectale, l'écriture et le document érudit, la connaissance artisanale de tous les métiers et de leur vocabulaire spécifique, la connaissance intime des lieux, des objets et des rites... et nous sommes encore très loin d'épuiser l'éventail !" (pages 11-12).
Là, c'est un peu poussé. L'auteur connaît les Açores : normal, il y est né. Et s'il suffit de mentionner quelques livres pour qu'on dise d'un écrivain qu'il puise dans la littérature... On n'est quand même pas dans l'Arrière-Saison de Stifter, ou dans Bouvard et Pécuchet.
Bref, à la fin de son texte qui glorifie la portée de l'ouvrage et sa complexité, après avoir consciencieusement raconté le roman, le préfacier fait un dernier pied de nez (pour ne pas dire un bras d'honneur) au lecteur, en écrivant : "
Il est temps maintenant de laisser le lecteur partir à la découverte de ces îles [...]" (page 15).
Sans rire !
Et il finit par : "
Mais non sans l'avertir que Gros Temps sur l'archipel est, avec Amour de perdition, de Camilo Castelo Branco, et Les Maia, de Eça de Queiroz, l'un des trois chefs-d'oeuvre absolus de la fiction portugaise." (page 15). Si après ça on n'est pas totalement enthousiaste à la fin du livre...

Le roman commence. Nous sommes donc dans les Açores, vers la fin de la Première Guerre Mondiale :
"
- Tu ne reviendras sans doute pas de sitôt...
João Garcia l'assura qu'il serait bientôt de retour. Les yeux de Margarida, profonds et bleus, avaient une lueur évasive, lointaine.
Elle baissa un instant ses paupières et reprit :
- Sait-on jamais ?
- Je resterai peu de temps absent, je te le garantis ! A l'Ecole des officiers de réserve les cours ne durent pas longtemps... Trois mois pour les fantassins. Ensuite, s'il y a une session cette année, je me présenterai au concours pour le poste de secrétaire général de la Préfecture.
" (page 21).

On fait ainsi connaissance avec les deux personnages principaux, un tout petit peu Roméo et Juliette : ils s'aiment, mais leurs familles pas vraiment. Le père de Margarida, Diogo Dulmo, est maintenant à la tête d'une entreprise de commerce, dans laquelle le père de João travaillait jusqu'à son renvoi, "diffamé" par ce Diogo Dulmo. Depuis, il gagne sa vie comme avoué et voue une haine féroce, quasi balzacienne, à la famille de Margarida. Le père de João est un des personnages intéressants du livre.
Diogo Dulmo, lui, est un pauvre type alcoolique qui mène sa famille à la ruine. Il y a donc une famille qui part de haut et qui descend, et une famille de "parvenus" qui monte, avec des moyens parfois à la limite de la légalité.

C'est un roman du temps qui passe : les petits événements, les grands, les maladies, la chute probable d'une famille...

Les histoires, les personnages ne sont pas présentés de façon claire dès le début, le lecteur débarque en plein milieu. Curieusement, il y a une sorte de petit résumé page 124, qui permet peut-être de faire le point, au cas où le lecteur serait trop perdu, car les personnages sont vraiment très nombreux. Que de frères, de soeurs, de cousins, de grands-tantes... il est parfois difficile de les situer (au bout d'un moment, perdu, je me suis fait un petit schéma).


A part cela, on a une page sur la condition de la femme :
"
Dans un pays où tout n'est qu'une question d'héritage et de négoce, que vaut une jeune fille ? Les robes, le bal, l'anniversaire, quelque fête, voilà les seules préoccupations qui lui sont permises ! Si mes parents n'ont plus d'autre ressource, n'est-il pas naturel que je leur vienne en aide ? Oui... On dispose de moi ! Evidemment ! Je suis une espèce d'immeuble qui par hasard est resté libre." (page 181).

On a aussi de la couleur locale :
"
Au printemps, les cérémonies en l'honneur du Saint-Esprit donnent à la vie des îles une animation exceptionnelle, comme si les hommes et les femmes, imitant les champs, se mettaient aussi à fleurir. Les sept ou huit semaines, entre Pâques, la Pentecôte et la Trinité, sont consacrées à des rites d'une espèce de floralie chrétienne, adaptée au rythme des cultures et à l'opulence des pâturages, de ces pâturages tout imprégnés d'humidité et couverts de trèfle au milieu des scories de lave." (page 215).


Il y a quelques facilités romanesques. Par exemple, à un moment, il y a un télégramme qui est envoyé à une personne, lui disant que quelqu'un de sa famille, mettons son "cousin" (je ne vais pas dire qui c'est, je n'écris pas de préface) est malade. Mais la personne qui a envoyé le télégramme n'a pas pensé à préciser lequel. Et hop, on a droit à des pages et des pages d'interrogations : si c'est un tel, ô mon dieu... mais c'est peut-être un autre... oh là là... on saura de qui il s'agit, vingt-quatre pages plus tard.

"
Vitorino Nemésio réussit dans ce roman un équilibre de construction, une richesse concrète d'incidents et de tableaux, un enchaînement profond de liens, une revalorisation du romanesque authentique qui, à la vérité, sont rares dans la fiction portugaise. [...] A l'enchantement de la narration, émaillée de grandes fresques des travaux maritimes, s'ajoutent la séduction d'un style puissamment suggestif, une langue colorée, pleine d'images : découverte magique du monde par la parole" (Dictionnaire des oeuvres, Robert Laffont).
Oui, enfin... il ne faut pas s'attendre (comme moi) à de grandes descriptions de chasse à la baleine : elle sont escamotées.


Ce n'est pas un roman inintéressant, mais il n'est franchement pas du niveau des Maia, et il est un peu long (ce n'est pas toujours passionnant).
Le plus intéressant (pour moi), c'est la découverte des Açores : cela donne envie d'aller y voir de plus près.


A noter quelques petites fautes de temps à autre, des guillemets mal placés (le passant attardé "se disant sans doute : « Voilà Garcia en train de manigancer ses intrigues... Mais en vérité ses occupations étaient tout autres. »" : la deuxième phrase est bien sûr un commentaire, ce n'est plus le passant qui pense ; page 165), et puis : les "genous" (page 346), un coeur bat "plus vie" (page 412), etc.


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