PHOTOS --->  Harunobu, un poète du féminin (30 août 2014).

(exposition du 18/06/2014 au 22/09/2014).

Deux fois par an, le musée Guimet sort quelques estampes de ses vastes réserves et nous les présente. Cette fois-ci, nous avons 44 (sur quelque chose comme 70 possédées par le musée) estampes de Harunobu Suzuki (vers 1725-1770)

"Harunobu, dont l’Oeuvre s’épanouit entre 1764 et 1770 avec le développement des images calendrier (egoyomi), est une figure insigne de l’histoire de l’estampe japonaise et un de ses maîtres les plus singuliers. Son travail faisant le lien entre la production antérieure d’images rehaussées de deux couleurs et celles présentant une polychromie enrichie, se démarque de celui des artistes de l’école Torii caractérisé par leurs portraits d’acteurs de kabuki : son Oeuvre s’attarde à la description de subtiles images féminines à la polychromie délicate.
Sur le plan technique, Harunobu expérimente en effet le procédé de l’estampe polychrome, nishiki-e, jouant des impressions aux couleurs multiples ou de gaufrages sophistiqués ; il se concentre sur des pigments qui lui ouvrent la voie de la couleur dans son plein épanouissement.
" (http://www.guimet.fr/fr/expositions/expositions-en-cours/harunobu-un-poete-du-feminin )

Voici comment l'exposition se présente, dans la rotonde du deuxième étage du musée Guimet :

harunobu      harunobu      harunobu      harunobu

"Si cerner quelques dates de son existence n'est pas chose simple, situer Harunobu dans le cours de l'histoire de l'ukiyo-e est plus aisé, puisqu'il occupe sans doute possible cette position singulière de passeur entre un univers presque archaïque de l'image imprimée en nombre limité de couleurs, et l'espace ouvert, désormais sans limites, de la xylogravure polychrome, né autour du nouvel an de 1765, qui se prolonge et s'épanouit, sans changement technique fondamental au moins, jusqu'à la fin de l'époque d'Edo." (Hélène Bayou, conservateur en chef au Musée des arts asiatiques-Guimet ; extrait du catalogue).
Les estampes avec plusieurs couleurs, même en nombre limité, ont été rendues possibles grâce à un petit truc, que l'on trouve dans la chronologie fournie dans l'exposition (et dans le catalogue) "vers l'année 1750" :
"L'apparition d'un repère gravé sur chaque planche d'impression, le kentô, permet un positionnement identique de la feuille de papier à chaque passage d'impression, et facilite donc l'avènement d'une technique d'impression polychrome."

liyohiro torii
Torii Kiyohiro (actif de 1737-1776) : couple d'acteurs de kabuki avec un chat. Impression bicolore en rouge beni et vert, benizuri-e.

Le passage des estampes bicolores à des estampes plus massivement polychromes s'est effectué entre 1764 et 1765, grâce à l'édition de calendriers. Pourquoi et comment ?

"L'avènement du calendrier lunisolaire en 1685 [remplaçant le système d'origine chinoise] aboutit à la création d'un calendrier, plusieurs fois révisé au cours des XVIII° et XIX° siècles, faisant alterner mois longs (trente jours) et mois courts (vingt-neuf jours), selon un ordre chronologique variable d'une année sur l'autre. La complexité du système, sa variabilité d'une année à l'autre [...] engendrèrent la publication de calendriers imprimés (Daishô reki) dont l'usage se fit autant nécessaire que ludique. Par le biais de l'introduction d'images plus ou moins cryptées, ces calendriers se firent au cours du XVIII° siècle supports de jeux visuels mêlant subtilement signes et images, suscitant à la fois recherche graphique et résonance littéraire. Les egoyomi, images-calendriers, sont ainsi la version purement imagée de ces calendriers, introduisant simplement au coeur d'une image imprimée la mention d'une suite de mois longs et courts pour une année donnée.
La pratique entraîna une surenchère de jeux intellectuels et poétiques séduisant nombre d'amateurs, ainsi que l'échange privé, à l'entrée dans la nouvelle année, de telles images luxueusement imprimées.
" (extrait du catalogue).

A l'occasion du passage à la deuxième année de l'ère Meiwa (1765), Harunobu fut sollicité. Ces calendriers étaient commandités et parfois conçus par des membres de cercles littéraires. Les clients étaient généralement aisés.

Les images-calendriers egoyomi sont le résultat d'une surenchère qualitative : papier, pigments de haute qualité... et polychromie. Ainsi qu'un très fort goût de l'allusion littéraire, de la métaphore.

Par la suite, les bois gravés ont été récupérés pour une édition commerciale : les nishiki-e ("images de brocart") qui succèdent aux images-calendriers egoyomi.


Voici quelques estampes polychromes nishiki-e visibles à l'exposition :


harunobu - fumer
Harunobu Suzuki : conversation autour du nécessaire à fumer. Estampe-calendrier egoyomi. Légers gaufrages (karazuri). (1766). Ces gaufrages sont bien visibles en "vrai".

cascade     harunobu moines
Harunobu Suzuki : La cascade de Nuno Biki (1665-1770). A droite : Représentation parodique (mitate-e) des moines zen Kanzan et Jittoku. Impression sur fond marbré. (1765-1770).


suzuki harunobu : beauté
Haronubu Suzuki : une page du livre Ehon Seirô Bijin Awase (Livre illustré de beautés comparées des maisons vertes). Format koban. (1770).


Deux estampes au format hashira-e (traduit généralement par "estampe-pilier") :

harunobu : paysage     mutamagawa
Haronubu Suzuki : à gauche : Paysage. Impression ishizuri-e (littéralement "estampes sur pierre", ou estampage) (1764-1769) ; à droite : série Fûzoku Mutamagawa (Six rivières Joyaux sur un mode contemporain), La rivière Ide dans la province de Yamashiro. Poème de Fujiwara no Shunzei (1114-1204). Impression polychrome nishiki-e. 1769-1770.

 

 

 

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