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Frans Emil Sillanpää
(Hämeenkyrö, Finlande, 16/09/1888 - Helsinki, 03/06/1964)

frans emil sillanpää

En 1958.

 

 

"Frans Emil Sillanpää est un écrivain finlandais, romancier et nouvelliste, adepte du néo-réalisme psychologique. Son principal roman, Sainte Misère (1919), évoque la Guerre civile finlandaise.

F-E Sillanpää est le fils de petits fermiers de l'ouest de la Finlande. Après avoir accompli sa scolarité au lycée de Tampere, il commence des études de biologie à l'Université d'Helsinki en 1908, études qu'il abandonnera en 1913 pour rédiger des articles dans le journal Uusi suometar.

Il écrit son premier roman la Vie et le Soleil en 1916.
Sillanpää a écrit une vingtaine de romans ou recueils de nouvelles dont un tiers a été traduit en français.

Ses personnages sont issus du petit peuple de la Finlande rurale : servantes, métayers ou petits propriétaires. Ils subissent leur destin, souvent une lente déchéance, avec une résignation passive ou une indifférence sereine.
La vie et une nature évoquées de façon lyrique leur offriront quelques périodes de rémission et de bref bonheur.

Un de ses poèmes, écrit en 1939, a été mis en musique en 1940 pour constituer un chant patriotique, le Chant de marche de Sillanpää (Sillanpään marssilaulu). [A écouter en bas de page]

Il a reçu le prix Nobel de littérature en 1939." (merci Wikipedia)

"Si la deuxième guerre mondiale a surtout coûté la vie à des millions d'être humains, le revolver de Hitler n'en a pas moins porté un coup sévère à la production artistique de son époque et à sa réception.
Le prix Nobel attribué en 1939 à Frans Emil Sillanpää [...], premier et unique Finlandais à avoir obtenu le prix à ce jour, passa presque inaperçu en dehors du monde scandinave. [...]
Le Prix Nobel lui fut décerné, comme le précise l'exposé des motifs du Comité Nobel, « pour la compréhension profonde et l'art exquis dont il a fait preuve dans ses tableaux de la vie paysanne telle qu'elle s'est formée par la nature même de son pays natal. »"
(introduction de Pierre-Alain Gendre à Une Brève destinée)

 

 

 

une brève destinée
Une brève destinée à Suomenlinna (Helsinki), le 30 juillet 2008.
En couverture : L.A.Ring. : « Au mois de juin. Jeune fille soufflant des graines de pissenlit », 1889. Galerie Nationale, Oslo.


- Une brève destinée. (Nuorena Nukkunut, 1931). Traduit du finnois par Jean-Louis Perret (1940). Revu et corrigé par Pierre-Alain Gendre. Phare. Esprit ouvert. 228 pages.

"Aucun des ouvrages de Sillanpää ne connut un succès aussi immédiat et quasi triomphal que Nuorena nukkunut, qu'on pourrait traduire par « Si jeune et déjà assoupie » et que nous publions sous le titre de Une brève destinée.
La traduction française de Jean-Louis Perret de 1940 a su, avec ses accents parfois ramuziens conserver la richesse d'évocation de l'original.
[...]
C'est peut-être avec ce roman (son troisième) que l'art de Sillanpää atteint son apogée à travers la description de la vie d'une fille du peuple, solitaire et douce, dans la société rurale d'alors qui avait formé le cadre de l'enfance de l'auteur. [...]" (introduction de Pierre-Alain Gendre).

Le roman commence :
"Silja, la belle jeune campagnarde, s'éteignit, une huitaine de jours après la Saint-Jean, alors que l'été rayonnait dans toute sa fraîcheur. Elle eut une fin très convenable, étant donné sa condition. Bien qu'elle ne fût qu'une servante orpheline de père et de mère, et sans autres parents à qui s'adresser, et bien qu'elle dût recourir un temps aux soins d'autrui, elle put se passer de l'assistance publique : ainsi lui fut épargnée cette petite laideur pourtant bien anodine. [...]
Notre Silja avait vécu vingt-deux ans [...]" (pages 11-12).
Dès le début, le suspense est volontairement limité.

Le premier chapitre, qui occupe la moitié du roman, arrive. Il concerne "Le père". Le deuxième chapitre occupe quant à lui la deuxième moitié du livre ; il est consacré à "La fille".

Le père de notre Silja s'appelle Kustaa, et c'est sous son père à lui - donc, sous le grand-père de Silja - que le domaine ancestral mais pas très grand de Salmelus connut son apogée. Kustaa est fils unique.
"Pendant sa jeunesse, le garçon vécut à sa guise. La ferme n'était pour lui qu'un vaste terrain de jeu qu'il parcourut en fredonnant et en souriant jusqu'à ce qu'il fût grand." (page 13).
Kustaa acquiert "le sentiment puissant que Salmelus avait une durée éternelle et ne dépendait pas des hommes, que tous les événements y étaient aussi naturels que la respiration ; le domaine dirigeait les hommes et n'était point dirigé par eux." (page 14).
Puis, sa mère décède.
Alors (y a-t-il un lien de cause à effet ?), Kustaa remarque une certaine Hilma, une fille de cuisine, qui n'avait pourtant rien de particulier.
"Des centaines de soirées d'été, vues de loin, sont identiques entre elles, comme des billets dans une coupe. Mais un des billets renferme le gros lot ; c'est passionnant et solennel comme une menace d'orage à l'heure d'aller au lit." (page 15).
Ce sera une bien mauvaise pioche, surtout à cause de la famille d'Hilma, des gens extrêmement désagréables.
Mais, d'une façon plus générale, et là c'est l'auteur qui parle : "L'amour commence, malheureusement, toujours par la période la plus délicate, si bien qu'il ne peut que se souiller avec le temps. L'amour d'un homme et d'une femme est un organisme dont les veines et les fibres, une fois rompues, ne peuvent plus se ressouder. Il serait prudent, dès le début, de lui maintenir un aspect rude et brutal, et pour un homme, le plus sage serait de prendre femme au diable vauvert, comme on dit." (page 50).
Le domaine n'est plus bien maintenu... c'est la longue pente... "Dans la ferme, les difficultés s'amoncelaient." (page 60).

Comme dans tout livre finlandais qui se respecte, il y a quelques descriptions de la nature bienvenues : "Doucement, sans faire grincer la porte, Silja sortait dans la cour où s'attardait le crépuscule printanier. Les touffes fleuries des merisiers sur les rives lointaines et le long des chemins semblaient suspendues dans l'air. Le chant des oiseaux se taisait peu à peu dans le voisinage des maisons ; mais au coeur des forêts éloignées, quelques chanteurs puissants exprimaient par leur longue, longue mélopée le charme profond de la nuit d'été nordique qui les avait attirés d'au-delà les mers et les terres." (page 87).

On trouve des lacs, bien sûr. "Le miroir de l'eau reflète en profondeur tout ce qui s'élève vers la hauteur. Les perceptions des sens semblent assurer Silja de leur bonté, en lui murmurant : s'il te manque quelque chose, nous ne pouvons que bercer ta langueur et tes désirs." (page 88). Le passage progressif à la nuit, dans le calme de la nature, est très bien rendu.

L'auteur n'hésite pas à utiliser quelques bonnes grosses ficelles légèrement emphatiques : "Pour la première fois, le regard de la jeune fille brilla dans cette maison, où, plus tard, devaient lui arriver des aventures superbes et capitales." (page 140).
Tadaam ! Lecteur, restez à votre poste, vous allez en voir !

Il faut dire que juste à côté, en Russie, c'est la révolution, et qu'elle déborde.

C'est la guerre civile. Les Blancs contre les Rouges.
"L'Etat-Major siégeait dans un nuage de fumée ; les hommes avaient l'air placide de gens qui détiennent la puissance. Ces quelques tenanciers et locataires, dont les ancêtres - et eux-mêmes dans leur jeunesse - avaient trimé une année après l'autre sans espoir de jamais améliorer leur condition, que leur travail eût été accompli paresseusement ou avec énergie, se trouvaient au comble du bonheur de former maintenant un Etat-Major. Ils avaient de la nourriture, du repos, du tabac, de beaux discours. Ils éprouvaient une forte émotion en donnant des ordres à des paysans naguère hautains ; au début, ils en avaient presque le vertige, ils sentaient qu'ils s'étaient engagés sur une voie dont l'aboutissement était des plus incertains. Ce sentiment s'associait aussi aux arrestations de personnes connues qu'on amenait devant eux." (pages 184-185).

C'est sans doute cette partie qui est la plus intéressante. Diego Marani, dans son roman Nouvelle Grammaire finnoise, écrivait : "Finlandais rouges et blancs se sont massacrés et exterminés à tel point que le pays resta vide pendant des décennies. Aujourd'hui encore, on ne parle pas de ces années-là." Je ne sais pas si c'est exagéré ou non, mais comment peut-on dire qu'on n'en parle pas quand le seul prix Nobel de Littérature finlandais y consacre de nombreuses pages dans un de ses romans ?

La guerre civile, donc. Elle sert toujours de révélateur : les rancoeurs qui ressortent, les réglements de comptes... les vrais caractères s'affirment, le courage comme la lâcheté, et on regarde ça d'autant plus effrayé que, nous mêmes, nous n'avons pas la moindre idée de ce qu'aurait été notre comportement. On espère le meilleur, on craint le pire.
Les gens qui se connaissent en arrivent jusqu'à s'exécuter, se dénoncer... c'est toujours fort et horrible.

Mais il y a encore de jolis passages, par exemple celui du soleil qui semble tout voir, éclairant un monde très beau, mais où quand "une petite bestiole s'envolait joyeusement dans la mer rayonnante, une hirondelle accourait allègre pour la gober" (page 226).
C'est la vie.

Les points forts du livre, c'est la guerre civile ainsi que les descriptions de la nature, et de nombreux passages, finalement.
Le mauvais point, pour moi (à part les considérations parfois un peu "gros sabots" - ou datées ?), c'est exactement ce que dit Wikipedia à propos des personnages de Sillanpää : "Ils subissent leur destin, souvent une lente déchéance, avec une résignation passive ou une indifférence sereine."
Assister à une déchéance, sans révolte... c'est triste, parfois comme dans un vieux film muet où l'on voit venir de loin toute la misère du monde qui va s'abattre sur le héros ou l'héroïne...


A noter qu'il y a de nombreuses petites fautes parfois assez agaçantes ("Au même moment, un craquement retentît", page 78), on a un "en vélo" (page 89), catéchumère (page 96), "lui avalent volé" (page 197), etc.

Un timbre à l'effigie de Sillanpää a été édité en Finlande :

sillanpää timbre

 

Et voici le Chant de marche de Sillanpää (Sillanpään marssilaulu), poème de 1939, musique de 1940.


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