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NAKAJIMA Kyoko(中島 京子)

(née à Tokyo 23/03/1964)

nakajima kyoko


"Kyoko Nakajima est née à Tokyo en 1964. La Maison au toit rouge, son quatrième roman, a reçu le prix Naoki en 2010 et a été adapté au cinéma en 2014 (Ours d'argent de la meilleure actrice)." quatrième de couverture du livre La Maison au Toit rouge).
Elle est aussi l'auteur d'au moins six recueils de nouvelles. Son premier roman, Futon a été nominé au prix Noma des nouveaux écrivains en 2003.
En 2014, elle remporte le prix Izumi Kyoka pour Tsuma ga shiitake datta koro (妻が椎茸だったころ). En 2015, elle remporte le Kawai Hayao Story Prize.

 

 

 

 

 

la maison au toit rouge

La Maison au toit rouge (Chiisai o-uchi, 小さいおうち, 2010). Traduit en 2015 par Sophie Rèfle. Seuil. 301 pages.
Adapté et mis en scène au cinéma par Yamada Yoji (c'est son 82ème film). Ours d'argent - Prix d'interprétation féminine (pour Huroki Haru, dans le rôle de Taki jeune).

"Depuis que j'ai cessé de travailler chez les Watanabe, je me suis retirée dans cette petite ville d'Ibaraki où je vis seule, chichement. Mon neveu, qui n'habite pas loin, m'invite de temps en temps chez lui, et je ne peux pas me plaindre de la façon dont je passe mes vieux jours." (page 7).
Taki, une vieille femme, écrit ses souvenirs. Elle a été employée comme bonne à Tokyo pendant longtemps, à partir des années 1930.
"Quand je suis devenue domestique au début des années trente, le personnel manquait dans les bons quartiers de Tokyo, et personne ne tutoyait les bonnes. Nos employeurs nous vouvoyaient parce que nous étions précieuses à leurs yeux. C'était la règle dans les bonnes familles. Toutes les maîtresses de maison savaient qu'une bonne de qualité était indispensable à un foyer bien tenu." (page 10).
"J'étais la cinquième d'une fratrie de six frères et soeurs. Mes quatre aînés avaient tous été placés comme domestiques et je trouvais normal d'en faire autant.
Tami, la soeur qui était immédiatement au-dessus de moi, était très malheureuse chez la famille riche du voisinage qui l'employait. Ses mains étaient gercées et crevassées quand elle était rentrée chez nous pour le nouvel an et elle m'avait raconté en pleurant les mauvais traitements qu'elle subissait. J'étais triste pour elle, mais nous, filles de la campagne, n'avions guère d'autres choix.
" (page 11).

Taki aura effectivement de la chance : elle n'aura pas à se plaindre des familles chez qui elle travaillera.

Elle se trouve rapidement dans la famille Hirai. M. Hirai est sous-directeur d'une fabrique de jouets. Sa femme, Tokiko, est bien jolie. Ils ont un fils unique. On est rapidement en 1937 et tout le monde se prépare pour les Jeux Olympiques de Tokyo prévus pour 1940... Quelle occasion en or pour vendre des jouets ! Mais, bien sûr, des nuages sombres s'avancent...
"A y repenser, [...] je crois me souvenir que c'est aussi le moment où les gens se sont mis à répéter à tout bout de champ : « N'oublions pas nos soldats ! ». Il se trouvait toujours un adulte pour répliquer cela à un enfant qui insistait pour avoir quelque chose, qui faisait le difficile ou le capricieux. Je ne crois pas que les gens qui utilisaient cette expression pensaient vraiment aux soldats, mais plutôt qu'ils s'en servaient parce que c'est pratique pour gronder les enfants.
Les garçons avec qui j'étais allée en classe à la campagne ont reçu les uns après les autres leur ordre d'incorporation. [...] Comme tout le monde était touché, plus personne ne s'en émouvait.
" (pages 50-51).
On est plongé dans le quotidien de l'époque, vu depuis les yeux d'une domestique qui ne quitte quasiment pas la maison, mais on perçoit les répercussions des événements qui se déroulent dans le monde extérieur. Cet éloignement est accentué dans le film (reconstituer Tokyo au cinéma, ça coûte cher ; dans un livre, c'est gratuit).

image du film

On n'a pas de grandes considérations de géopolitique, ou bien après quelques coupes d'alcool - et le niveau de l'analyse est alors forcément limité.

La maîtresse de maison s'ennuie, aimerait aller au cinéma ; elle feuillette la revue d'art Mizue sur la grande exposition organisée pour célébrer l'an 2600. Taki en ayant conservé un exemplaire, le neveu a pu la montrer à une amie connaisseuse en art ; il parle ainsi à sa tante :
"
il n'y a que des oeuvres d'artistes célèbres ! [...] Ryūzaburō, Kumagai Morikazu, Fujita Tsuguharu, Koiso Ryōhei, Yasui Sōtarō, Nakagawa Kazumasa, ou Kimura Shōhachi... Et beaucoup d'autres, n'est-ce pas, puisqu'il y en a une centaine. Elle a aussi été très étonnée de voir que les tableaux ne représentaient pas la guerre. Parce qu'elle croyait qu'à cette époque les peintres japonais ne faisaient que des tableaux du genre de La Charge suicide d'Attu de Fujita." (page 133).

On pourra voir en bas de page - annexe 1 - des oeuvres de ces peintres (y compris l'oeuvre de Fujita dont il fait mention), mais pas nécessairement des années 1930-1940 : on trouve les reproductions que l'on peut...

"1940 est avant tout l'année 2600 du calendrier japonais. Elle ne pouvait qu'être faste, disait-on, puisque deux mille six cents ans auparavant le Japon avait connu son premier empereur, Jinmu." (page 134).

En l'honneur de cette année 2600, des compositeurs du monde entier ont été chargés par leurs gouvernements d'écrire des musiques commémoratives. Richard Strauss, Jacques Ibert... On trouvera en bas de page - annexe 2 - plus de détails sur ce fameux concert.

naxos

Dans le film, il est aussi question d'un concert, mais c'est une petite chose avec musique de chambre.

Puis, vient le jeune homme de constitution fragile mais à l'âme d'artiste, qui va intéresser la femme que son mari délaisse... Voici le jeune homme :

image du film

Les relations entre la femme et son mari sont plus intéressantes dans le livre : le mari frôle le caricatural dans le film, alors qu'il y a quelque chose qui est expliqué dans le livre.

On apprend pas mal de choses sur le quotidien de l'époque. Par exemple, il y avait des soldes spéciales dans les magasins pour célébrer des victoires de l'armée nippone !
A un autre moment, l'Association de soutien au trône impérial a publié des critères de la beauté patriotique, pour lutter contre l'influence de la mode qui présente une silhouette fluette et une peau blanche. "En tout cas, ceux qui nous gouvernent ont décidé de définir l'idéal féminin comme une femme aux hanches larges, capable d'avoir beaucoup d'enfants." (page 155).
On voit aussi les conséquences du bourrage de crâne patriotique à l'école, la désinformation sur les défaites de l'armée (mais cela, avec le recul uniquement) ; les destructions préventives en vue des bombardements à venir...

Au fur et à mesure que la vieille Taki écrit ses souvenirs, son neveu lit les feuillets. Il lui fait parfois des reproches, notamment le fait que la guerre ne soit pas assez présente : pouvait-on vraiment être heureux et insouciant en ces temps troublés ?
"Takeshi, mon petit-neveu, continue à me critiquer. Selon lui, j'écris des bêtises et la guerre n'était pas si joyeuse. Pourtant, dans mon souvenir, l'année qui s'est écoulée entre Pearl Harbour et les élections municipales a été sereine." (page 203). Quelle est la part de vérité historique et celle qui résulte de l'embellissement du passé par la mémoire sélective ?

C'est un bon roman.

 

Bande-annonce du film de Yamada Yoji (musique de Joe Hisaishi) :

 

 

Annexe 1 - la peinture :


shohachi kimura   yasui      koyso    danseuses   umehara
Kimura Shōhachi 1893-1958) : Scène au restaurant de viande (1932) ; Sōtarō Yasui (1888-1955) : Portrait de F. (1939) ;
puis deux oeuvres de Koyso Ryohei (1903-1988) : Portrait de Mlle T. (1926) et Danseurs dans l'atelier (1938) ;

Umehara Ryūzaburō (1888-1986) : Mont Sakurajima le matin (1935).

poissons   lys   tournesols   fukuura
Quatre oeuvres de Nakagawa Kazumasa (1893–1991) : Poissons ; Lys ; Tournesols (1958) ; la Jetée de Fukuura (福浦突堤, 1966).
Voir d'autres oeuvres notamment sur : http://www.nakagawamuseum.jp/Possession/

1966 la lune         le chat  chat exposition
Des oeuvres d'un artiste qui aimait beaucoup les chats : Kumagai Morikazu (1880-1977) ; les deux premières oeuvres datent de 1966.
On pourra voir le site : https://todoloki.wordpress.com/2012/08/30/kumagai-morikazu-1880-1977/

 

est bien sûr le peintre japonais le plus connu. Lui aussi aimait les chats...

chat couturier
Chat couturier (1927).

Pendant la guerre, il a peint des oeuvres plus "engagées", utilisant un style bien différent :

attu     saipan
Mort lumineuse aux îles Attu (Attsu-tô gyokusai, アッツ島玉砕). 1943. A droite: Nos frères de Saipan fidèles jusqu'à la mort (Saipan-tô dôhô shinsetsu o mattô su), 1944-1945.
A propos de "Mort lumineuse" : "Des contours fluides, une touche déliée, mais surtout la grande transparence d'une huile où dominent les tons terreux, concourent à fondre les différents éléments en une même masse. [...] Dans la presse nippone, la présence d'adolescents parmi les soldats japonais avait contribué à mettre en relief la bataille d'Attu ; Fujita ne retient pas cet élément dans son oeuvre. Au contraire : plutôt que la jeunesse et l'innocence, les visages des soldats japonais sont d'une totale bestialité ; plusieurs ont des expressions simiesques, comme le personnage au centre qui s'apprête à égorger un soldat américain avec sa baïonnette ou comme un autre, en haut à droite, qui brandit son sabre." (Michael Lucen, L'Art du Japon au Vingtième siècle, page 147). Michael Lucen note également que "La représentation d'une croix par Fujita au premier plan du tableau ne peut pas être le fruit du hasard."

fleuve    avions
Le Fleuve Yangtze pendant la prise de Hankow. Huile, 193x259,5cm (1938-1939). Destruction des avions chinois à Wanchang. Huile, 192 x 518 cm. (Ere Showa, 13ème année, soit 1938-1939). Ce dernier tableau a été exposé à la commémoration du 2600ème anniversaire de la dynastie impériale japonaise. Musée national d'Art moderne, Tokyo.


1946. "En avril, la nouvelle « Association des artistes progressifs » et son chef Uchida Iwao se rendent chez Foujita pour lui demander d'assumer toute la responsabilité criminelle de la propagande des militaires nationalistes. Alors que, pendant la guerre, on avait trouvé que ses peintures n'exaltaient pas suffisamment l'esprit victorieux et la suprématie de l'armée nippone, maintenant, on le tient pour responsable, en tant que chef du groupe des peintres de guerre, de tous les crimes des militaires." (Sylvie et Dominique Buisson, Léonard-Tsuguharu Foujita, ACR Edition, page 204).

 

Annexe 2 - la musique :

A l'occasion de l'année 2600, des compositeurs de plusieurs pays ont été chargés par leurs gouvernements respectifs d'écrire des musiques commémoratives.
- C'est Goebels qui a confié à Richard Strauss la tâche de composer une oeuvre. Strauss s'est donc interrompu dans la composition de L'Amour de Danae pour s'atteler à la Japanische Festmusik, qui est semble-t-il une de ses moins bonnes pages...
- Jacques Ibert a composé une Ouverture de fête.
- Britten, lui, a proposé une Sinfonia da Requiem, qui fut refusée : le ministre des affaires étrangères japonais y a vu une insulte (sans doute à juste titre).
- L'Italien Ildebrando Pizzetti (1880-1968) a composé une symphonie "In Celebrazione dell XXVIo Centenario della Fondazione dell'Impero Giapponese"
- Le Hongrois Sándor Veress (1907-1992) a composé sa Première symphonie.
- Le Japonais Hisato Ohzawa ("Son relatif oubli aujourd'hui contraste avec le fait qu'il était l'un des plus éminents compositeurs japonais de son époque." dit Wikipedia) a composé sa Symphonie n°3, dite "Symphonie pour la Fondation du Japon".

Voici ces oeuvres :

Richard Strauss : Festmusik zur Feier des 2600 jährigen Bestehens des Kaiserreichs Japan für großes Orchester (1940)

 

Jacques Ibert : Ouverture de Fête (1940).

 

 

Benjamin Britten : Sinfonia da Requiem, sous la direction de Thomas Adès (BBC Proms 2013).

 

 

Sándor Veress : Symphonie 1, sous la direction de Kunihiko Hashimoto (1940).

 

 

Hisato Ohzawa : Symphonie n°3 "Fondation du Japon".

 

 

  

 

- Pizzetti Ildebrando : Symphonie en La (1940), par l'Orchestre Symphonique Impérial du 2600 Anniversaire sous la direction de Gaetano Komeri. Il s'agit donc de l'enregistrement historique du Concert donné à l'occasion du 2600ème anniversaire, le 7 décembre 1940 au Palais Impérial de Tokyo.

 

 

 

En complément de programme, voici le 1er mouvement du concerto n°3, dit "Kamikaze" de Hisato Ohzawa (1938).

 

 



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