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CHI Li

(1957 - )

Née en 1957 à Wuhan, Li Chi est médecin. Elle est également diplômée de la faculté de langue et de littérature chinoises de l'Université de Wuhan, et est une des fondatrices du mouvement néo-réaliste chinois.

triste vie

- Triste Vie (Fannao rensheng, 1987). Traduit du Chinois en 1998 par Shao Baoqing. 100 pages (Babel).

Le lecteur suit vingt-quatre heures dans la vie de Yin Jiahou, un ouvrier spécialisé dans l'utilisation de machines japonaises de haute technologie dans une usine métallurgique de pointe.
Dès le début du roman, il se fait houspiller par sa femme.
"Regarde donc autour de toi. Tu as déjà vu quelqu'un qui n'arrive pas à obtenir un logement avec dix-sept ans d'ancienneté ? Est-ce que c'est humain d'habiter un taudis pareil ? Non, c'est juste bon pour les cochons. Même ça, c'est moi qui l'ai décroché. Quand on est un homme, avec femme et enfant, au moins on trouve un trou pour les caser. Quelle chiffe molle ! Tu n'as rien d'un homme." (page 9).

Pas facile... Mais elle n'a pas tout à fait tort, sa femme. La vie, quand on se marche dessus faute de place, ne facilite pas la tranquillité du ménage.

D'ailleurs, on se rend vite compte que la vie use les sentiments :
"Yin sourit. Il n'arrivait plus à sourire de façon spontanée qu'avec son fils. C'était son seul refuge." (page 11).
Yin doit se lever très tôt pour aller au travail.

C'est la course, il faut ruser pour obtenir une place dans l'autobus, et ne pas rater le bac qui traverse le fleuve, sinon, c'est le retard assuré ! Qu'il est long, le chemin pour arriver au travail...

"Sur le large fleuve Yangtsé, le flot montant soulevait des vagues puissantes. Le bateau descendait le courant en fendant la houle, en direction de l'autre rive. Le soleil se levait à l'avant, tandis qu'à l'arrière un vol de mouettes blanches tournoyait dans le sillage du bateau. Qui ne souhaiterait profiter d'une aube aussi admirable ! Cependant aucun des passagers du bateau n'y prêtait la moindre attention. Accoudé au bastingage, une cigarette aux lèvres, Yin avait l'esprit aussi agité que l'eau qu'il contemplait." (pages 22-23).

Sur le bac, on se connaît, on discute d'un peu tout, même de littérature, de poésie moderne. Bai, un ingénieur, s'exprime ainsi : "L'argent, ça pue toujours l'argent, répliqua-t-il. La vraie vie c'est la littérature, la poésie, les poètes. Quel plaisir matériel peut rivaliser avec ceux de l'esprit ?" (page 26).

Ce trajet est à comparer avec celui du retour, le soir : "Curieusement, si le matin on se rencontrait entre collègues, le soir on ne voyait sur le bateau pratiquement que des visages étrangers. Tous portaient sans exception le masque de l'ennui et de la lassitude." (page 80)

Il faut vite déposer le fils au jardin d'enfants, et hop hop, le travail !

Yali, une jolie stagiaire qui apprécie beaucoup Yin (rassurons-nous : il n'y a pas d'histoire d'amour à la gomme, seulement le devoir et les regrets, le rêve qui est phagocyté par la réalité) : "Mais vous, vous ne devriez pas continuer à vivre comme vous le faites maintenant. Votre vie est trop ennuyeuse, trop pénible. Vous méritez mieux que ça." (page 45).

"Triste vie" est le titre du roman. Et effectivement : "J'ai l'impression d'avoir raté ma vie", lui écrit un ami de l'époque où il avait été envoyé à la campagne, comme tant d'autres jeunes gens. "Ma femme qui, contrairement à nous, n'a pas connu la vie à la campagne s'en félicite. A mon avis, elle a tort. Il lui manque ce je-ne-sais-quoi que la vie d'alors a donné aux jeunes filles, et qui rend les femmes plus belles." (page 60).

"Les rêves idéalistes de l'adolescence disparaissent dès qu'on atteint l'âge adulte. Yin avait changé avec le reste de la société, partageant ses aspirations et ses soucis : les résultats de l'équipe de football chinoise dans le match de qualification pour la coupe du monde au Mexique, l'état du conflit sino-vietnamien, les succès des bombes biologiques dans le traitement du cancer, le prix des allumettes. En fait, conscient qu'il était d'être un homme ordinaire, vivant de ses bras et d'un salaire, il ne s'était jamais demandé s'il fallait regretter les rêves de la jeunesse. Comment aurait-il pu se permettre de rêver ! La vie avait passé si vite, semaine après semaine. Lorsque sa femme avait été enceinte, les couches n'étaient pas encore prêtes que son fils était déjà né.[...]- Les souvenirs appartiennent au passé, aussi vrai que l'amertume doit s'avaler en serrant les dents." (pages 62-63).

Plus loin : "Comme il avait changé par rapport au temps de sa jeunesse ! A l'époque, il était un jeune homme dans la fleur de l'âge, qui respirait la vigueur, sûr de lui, toujours bien mis. Il n'engageait jamais de conversation à la légère avec les femmes, ne plaignait personne et refusait qu'on s'apitoyât sur son sort. De ce changement, il ne savait pas trop s'il fallait se réjouir ou au contraire s'attrister." (page 79).

Yin est certes un peu mou, mais de la mollasse du rêveur, de l'homme qui a un reste d'utopie en lui, mais qui voit le temps passer si vite que déjà ses espoirs ne sont plus que les rêves chimériques d'un passé révolu. Mais, promis, il fera tout ce qu'il pourra pour offrir le repas occidental dont sa femme rêve.
Promis.

Un excellent roman. Le jour où vous en aurez un peu assez de vous sentir joyeux, Triste Vie est le remède qu'il vous faut.

Attention ! Ne pas dépasser les doses prescrites.

trouee dans les nuages

Trouée dans les Nuages (yun po chun, 1997). Roman traduit du Chinois en 1999 par Isabelle Rabut et Shao Baoqing. 114 pages. Babel.

C'est l'histoire du moment où la vie tranquille d'un couple explose.
Jin Xiang est d'origine paysanne.
"Il avait adhéré au Parti à l'université, et était entré à l'Institut de recherches métallurgiques à l'âge de vingt-cinq ans.[...] Depuis peu, influencé par l'air du temps, il avait essayé lui aussi de se lancer dans les affaires et de monter quelques entreprises, sans que celles-ci prissent jamais une réelle ampleur." (page 11). En plus de son travail, il essaye donc de gagner de l'argent lui aussi, mais sans enthousiasme, presque pour faire comme tout le monde.

Sa femme, Zeng Shanmei, a reçu une excellente éducation. Elle n'est pas du même milieu que son mari.

"Car ici tous sans exception lui reconnaissaient une féminité hors du commun. Féminine, elle l'était d'abord au physique.[... Si pour couronner le tout, elle avait possédé une jolie figure, c'en était fait d'elle : elle aurait affolé les hommes et rendu la vie impossible aux personnes de son sexe. Dès lors, le destin amer des femmes trop belles aurait peu à peu refermé son piège sur elle. Par un heureux hasard, elle avait des traits fort ordinaires, quoique réguliers. Rien de trop en un mot, ce qui prouvait qu'elle était une femme sage." (page 15).

"A une époque comme la nôtre, où la réserve est devenue rarissime chez les jeunes filles, il n'en fallait pas plus pour émerveiller et attendrir les intellectuels mâles, et réveiller le généreux chevalier et le gentleman qui sommeillaient en eux." (page 16).
Même si elle gagne de l'argent comme son mari, c'est lui qui prend les initiatives :
"Pour le reste, nous avons peu à ajouter sur elle. Orpheline de bonne heure, elle n'avait pas encore d'enfants et dépendait entièrement de son mari pour la vie de tous les jours. Son passé était si simple qu'il en semblait terne." (page 14).

Mais est-ce bien vrai ? Le "regard clairvoyant de la multitude" dont parle Chi Li à plusieurs reprises, très ironiquement, n'a en tout cas rien vu...

On remarquera le style "objectif" du narrateur, qui intervient pour présenter, faire des commentaires.

Le mari et la femme travaillent tous deux à l'Institut de recherches métallurgique, où "ils étaient aussi visibles que deux étoiles par une claire nuit d'été." (page 17). Ils n'arrivent pas à avoir d'enfant.
Leur vie tranquille, bien réglée, bascule à cause d'une invitation reçue.

"Sont-ce les effets de l'âge qui pousse à la nostalgie ou à de nouvelles quêtes sentimentales ? Ou bien l'influence des rengaines à la mode et de la culture soap ? Toujours est-il que nous ne pouvons pas mettre les pieds dans un restaurant sans tomber sur un de ces rassemblement de quadragénaires ou de quasi-quadragénaires." (page 21)

S'ensuit un sacré déballage, accompagnée d'une rancoeur de classes, à côté de quoi La guerre des Roses (le film de Danny DeVito) fait figure de petit amusement pour gosses.

Un très bon roman, vraiment sombre, qui passe très bien grâce au style ironique de l'auteur.


Egalement traduits en français :
- Pour qui te prends-tu ?
- Préméditation
- Soleil Levant
- Tu es une rivière
- Soleil levant
- Un homme bien sous tous rapports
- Les sentinelles de blés
- Le show de la vie

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