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GOMBROWICZ Witold

(Maloszyce -Pologne-, 04/08/1904- Vence - France - 24/07/1969)

gombrowicz

Witold est le dernier de quatre enfants d'une famille de la noblesse terrienne de la région de Varsovie. Après des études de droit à l'université de Varsovie, puis de philosophie et d'économie à Paris, il publie Mémoires du temps de l'Immaturité en 1933 puis Ferdydurke (1937), qui le fait connaître.
Il est en Argentine en 1939... et les Nazis envahissent la Pologne. Il reste en Argentine jusqu'en 1963, en proie à de graves difficultés financières.
1956 : quatre de ses livres paraissent en Pologne. C'est le succès, qui s'emplifiera dans le reste du monde dans les années 1960. Toutefois, ses livres sont rapidement intedits en Pologne, interdiction qui sera levée en 1986.
1963 : Gombrowicz est de retour en Europe, à Berlin Ouest.
1964 : il s'installe à Vence.
1967 : Prix International de Littérature pour Cosmos. Il décède la même année.


Gombrowicz est considéré comme un des auteurs majeurs du XX° siècle.

ferdydurke


- Ferdydurke. 401 pages. Traduit du polonais par Georges Sédir. Folio.

Varsovie, les années 1930.

Le narrateur a dépassé le "Rubicon" de la trentaine. Pourtant, il se sent jeune par certains côtés... son immaturité ?
Il se voit reprocher sa situation floue : il n'a pas de situation précise, il n'est pas médecin, ni avocat...
"Quand eurent percé mes dernières dents, les dents de sagesse, il fallut réfléchir. L'évolution était accomplie, le moment était venu de l'inévitable meurtre, l'homme fait devait tuer le garçon inconsolable, puis s'envoler comme un papillon en abandonnant la chrysalide. Quittant les brumes, le chaos, les troubles effusions, les tourbillons, les courants et les tumultes, les roseaux et les coassements de grenouille, je devais revêtir des formes claires, stylisées, me peigner, m'arranger, entrer dans la vie sociale des adultes et discuter avec eux." (page 10).

L'immaturité, c'est le sujet du livre (enfin, un des sujets, je crois...).
Le narrateur veut toutefois "créer sa propre forme" en écrivant :
"Que ma forme naisse de moi, qu'elle ne me soit pas donnée de l'extérieur ! L'indignation me pousse à prendre la plume. Je sors du papier d'un tiroir et voici le matin, le soleil inonde ma chambre, la servante m'apporte le café et les petits pains, et moi, entouré de formes brillantes et ciselées, je commence à écrire les premières pages de mon oeuvre, mon oeuvre propre, semblable à moi, identique à moi, née de moi directement, introduisant de façon souveraine ma propre raison d'être contre tout et contre tous, quand soudain on sonne, la servante va ouvrir, à la porte apparaît T.Pimko, docteur ès lettres et professeur, plus exactement enseignant, grammairien cultivé de Cracovie, homme petit, fin, maigrichon, chauve, à binocle, avec un pantalon rayé, une jaquette, des ongles saillants et jaunes, des souliers de daim jaunes." (pages 25-26).

Voici Pimko, professeur machiavelique, qui jette le narrateur dans une machination infernale.

Il cuculise (ce n'est pas un gros mot...) notre narrateur, qui est maintenant appelé "petit Jojo" : tout le monde le perçoit désormais comme un enfant, malgré ses trente ans passés ! Direction : l'école !

"Le cucul, le cucul, le cucul. Je ne sais pas si vous le croirez, les adultes artificiellement rapetissés et infantilisés par nos soins constituent un élément meilleur encore que les enfants à l'état naturel. Le cucul, le cucul ! Sans élèves, il n'y aurait pas d'école et sans école, il n'y aurait pas de vie." (page 55).
Et plus loin : "Il n'y a rien de pire que des maîtres à la personnalité sympathique, surtout si, par hasard, ils ont des idées à eux. C'est seulement un enseignant désagréable qui peut inculquer aux élèves cette bonne immaturité, cette sympathique maladresse ou impuissance, cette ignorance de la vie qui doivent marquer la jeunesse pour qu'elle reste dépendante de gens honnêtes comme nous, pédagogues par vocation. C'est seulement à l'aide d'un personnel adéquat que nous pourrons faire retomber le monde entier en enfance." (page 57).

Ce n'est pas un livre de SF avec une conspiration extra-terrestre, c'est du "grotesque".

Les professeurs sont consternants (ah, les cours de littérature... un grand moment !).

Les concours de grimace sont de véritable duels (et l'histoire du duel entre le roi des synthéticiens et l'analyste ! Un grand moment de n'importe quoi brillant.)
Parfois, le cours de l'histoire s'interrompt et l'auteur parle de son livre, celui que l'on lit... et c'est délirant, souvent très drôle (un humour très second degré que tout le monde n'appréciera pas forcément).

Mais, se demandera-t-on, pourquoi le narrateur ne s'échappe-t-il pas de l'école ?
"Cependant, au lieu de m'échapper, je fis remuer mes doigts de pieds dans mes chaussures, et ce remuement paralysait et anéantissait tout désir de fuite, car comment s'échapper quand on est en train de remuer ses doigts de pied ?" (page 70)

Il y a quasiment du Tex Avery dans la distorsion des visages, étonnamment plastiques, qui reflètent les émotions (notamment la haine).

Alors, maintenant, du côté des idées et du sens... Gombrowicz fait un éloge de l'immaturité de l'écrivain, qui progresse en écrivant. S'il était mûr, il serait au sommet, et n'aurait plus de marge de progression.
Il parle aussi du culte du jeunisme, du modernisme, du sport ("la lycéenne était attablée, parfaitement assise, rayonnant d'une culture physique quasi-bolchéviste [...]", page 199).
Que peut-on y voir d'autre ? L'influence de la forme sur ce que l'on est ? les rôles que l'on joue pour être ce que l'on nous dit d'être ? (le poids de la société, donc).
Gomborwicz tape sur ceux qui croient comprendre quelque chose à la littérature... En fait, il tape sur beaucoup de monde.

Mais, plus généralement, que veut dire ce livre ? Gombrowicz, roublard, pose lui-même la question au lecteur : "Il faudrait aussi établir, définir et décréter si c'est un roman, un journal, une parodie, un pamphlet, une variation sur des thèmes imaginaires, une étude - et ce qui prévaut en lui : la plaisanterie, l'ironie ou un sens plus profond, le sarcasme, le persiflage, l'invective, la sottise, le pur non-sens, la pure blague - à moins qu'il ne s'agisse d'une pose, d'un artifice [...]." (pages 281-282).

Bref, il dynamite tout, pose des fausses pistes.

Un très bon livre, original dans le fond et dans la forme, mais je ne sais pas exactement ce que j'ai lu. Est-ce un mal ?



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