Livre.gif (217 octets) Littérature Portugaise Livre.gif (217 octets)



-
dictées
-
littérature
- listes
- liens recommandés


Papillon.gif (252 octets)

-> retour
Littérature portugaise
<-


Autre littérature :

Littérature japonaise

retour
page d'accueil

 


José Maria de Eça de QUEIROZ
(Póvoa de Varzim - nord de Porto - 25/11/1845, Neuilly, 16/08/1900)


eça de queiroz

 

Un des plus grands écrivains Portugais, maître du "réalisme" (naturalisme), ce qui ne l'empêche pas d'évoluer vers du romanesque dans Les Maia, son chef-d'oeuvre.
Son père était magistrat, et sa mère orpheline de bonne famille... mais ses parents ne se marièrent que quatre ans plus tard, Eça de Queiroz ayant été bâtard (et élevé par ses grands-parents paternels) pendant tout ce temps. "Bien que ses parents, maintenant mariés, habitassent cette ville, ils n'avaient pas voulu garder à leur foyer ce témoin fâcheux d'un péché de jeunesse propreà nuire à la carrière du digne magistrat. Et c'est seulement en 1885 qu'Eça de Queiroz fut enfin légitimé par son père ! On imagine sans peine quelle marque ineffaçable, quelle blessure profonde cette demi-bâtardise put laisser dans l'âme d'un jeune garçon sensible." (page 7 de l'introduction des Maia).
En 1885... Eça avait donc quarante ans !

Après des études à Coimbra, il s'installe à Lisbonne et publie des textes. Il exerce un temps son métier d'avocat à Evora, voyage en Egypte, Syrie... il assiste à l'inauguration du canal de Suez.. Il est nommé consul à La Havane (1872). Il voyage au Canada, aux Etats-Unis, en Amérique centrale.
Le Crime du Père Amaro, son premier grand roman, paraît en 1875.
En 1878, il est nommé consul à Bristol et Newcastle (Angleterre). En 1885, il est consul à Paris. Il publie les Maia.

Eça de Queiroz était un grand lecteur de littérature française : Balzac, Stendhal, Flaubert, Baudelaire, Taine, Proudhon...

"L'art est tout, car lui seul dure, et tout le reste est néant". (extrait d'une de ses Notes contemporaines, cité page 18 de l'introduction aux Maia).

Photographié à Coimbra, dans le cloître du Sé Veilha, le 01/06/2010.

- Les Maia, épisodes de la vie romantique (Os Maias, 1888, Editions Chandeigne, première édition 1996, traduit par Paul Teyssier). 797 pages.

On est dans le dernière quart du XIX ° siècle.
"Les Maia étaient une vieille maison de la Beira qui avait toujours été peu nombreuse, sans collatéraux, sans parentèle, et se réduisait alors à deux mâles : le chef de la famille, Afonso da Maia, un vieillard déjà, presque un ancêtre, né avant le siècle, et son petit-fils Carlos, qui faisait ses éudes de médecine à Coimbra." (page 22).
Pendant ce temps, les affaires sont bien gérées par un régisseur.
Un jour, le grand-père décide de revenir au Ramalhete, leur maison de Lisbonne, actuellement située rua do Presidente Arriaga (non, la voiture n'est pas d'époque) :

"Et si Afonso, à son âge, aimait la paix de Santa Olavia, son petit-fils, jeune homme de goût et de luxe, qui passait ses vacances à Paris et à Londres, ne voudrait certainement pas, à la fin de ses études, aller s'enterrer dans les rochers du Douro." (page 23).

Des dépenses sont engagées.
Le régisseur n'est pas très chaud, il rappelle que "
les murs du Ramalhete avaient toujours été fatals aux Maia, « quoique j'aie presque honte, ajoutait-il en une phrase méditée, de mentionner de telles fariboles au siècle des Voltaire, des Guizot et autres philosophes libéraux... »" (page 23).
Afonso en rit : "
Quant aux légendes et aux présages, il suffirait d'ouvrir toutes grandes les fenêtres et de laisser entrer le soleil." (page 23).
Afonso est un vieil homme sage, honnête, un homme de principes.
Son petit-fils, Carlos, est un dilettante sympathique, cultivé, riche. Il va faire de la médecine en dilettante, il va aborder toute sa vie, ou presque, en dilettante. Il a quelques ambitions dans les domaine de la littérature et des idées.
Son ami João da Ega est le représentant de la modernité littéraire, le naturalisme ; le romantisme est incarné par un vieux poète, Alencar.
On assiste à des discussions de snobs parfois très amusantes sur la politique, la littérature, la musique. Il y a ceux qui donnent le "ton", et les suiveurs qui veulent être "chics". Il y a les hommes politique, notamment un Ministre de Finlande dont les analyses politiques prudentes sont d'une remarquable acuité.
Mais revenons à Carlos, ou plutôt à son père. Qu'est-il devenu ? On l'apprendra vers le début du roman, qui commence rudement bien, et qui marque le reste du roman.

Parlons maintenant un peu de celle qui devait devenir sa mère : "
Quand elle traversait le foyer, les épaules se courbaient devant l'éblouissante auréole émanant de cette magnifique créature, qui laissait traîner d'un pas de déesse la queue de sa robe de cour, toujours décolletée comme pour une soirée de gala et, quoiqu'elle ne fût pas mariée, resplendissante de bijoux. Son père ne lui donnait jamais le bras : il suivait derrière, engoncé dans une cravate blanche de majordome, paraissant encore plus hâlé, encore plus homme de mer dans la clarté blonde dégagée par sa fille, l'air timide et presque apeuré, tenant dans ses mains la lorgnette, le livret d'opéra, le sac de bonbons, l'éventail et son propre parapluie." (pages 40-41). Etrange personnage que ce père... Il aurait fait fortune grâce à la traite des esclaves, une honte !

Il y a une galerie de personnages bien typés, vivants. João da Ega est particulièrement réussi, comique, provocateur ; il brille en société.
"
- Allons, allons, John, tu ne respectes rien...
- L'insolence est la condition du progrès, monsieur Afonso da Maia. Le respect, c'est la décadence. On commence par adrmire un Gouvarinho, puis, par distraction, on en arrive à respecter le Monarque et on finit, au moment où l'on s'y attend le moins, par rendre hommage au Tout-Puissant !... Il faut prendre garde !
- Hors d'ici, John, hors d'ici ! Tu es l'Antéchrist en personne...
" (page 232).

Il y a aussi Dâmaso Salcede, personnage grotesque, vulgaire, d'une grande importance, un peu malgré lui.

Les joutes verbales, les projets de rénover la société, tout cela c'est bien, mais il ne faut pas oublier les amours... Carlos est beau, chic, distingué, intelligent, riche... il a tout pour plaire, notamment aux femmes mal mariées !

Il y a parfois de bien jolies descriptions : "
La mer formait au fond une ligne continue, estompée dans la ténuité diffuse de la brume bleutée. Au-dessus se déployait un grand azur lustré comme un bel émail, avec seulement, là-haut, un petit nuage oublié comme un chiffon, qui dormait pelotonné et suspendu dans la lumière..." (page 273).

A Sintra, Carlos parle avec un pianiste de ses amis, Cruges : "
Les artistes, d'après lui, n'aiment dans la nature que les effets de lignes et de couleurs. Pour s'intéresser au bien-être d'une tulipe, pour veiller à ce qu'un oeillet n'ait pas soif, pour se sentir malheureux parce que la gelée a grillé les première pousses des acacias, il faut être un bourgeois, un de ces bourgeois qui descendent tous les matins dans leur jardin, avec un vieux chapeau et un arrosoir, qui voient dans les arbres et dans les plantes une autre famille silencieuse dont ils sont également responsables..." (pages 267-268). Ah la la, que dirait Adalbert Stifter, l'auteur de l'Arrière-Saison...

Mais le grand sujet de discussion, c'est la société où tout est en décadence, et puis la littérature, les nouveaux courants...
Le poète romantique, Alancar, s'emporte : "
Toutes ces histoires de réalisme et de romantisme, c'est des bêtises !... Un lis est aussi naturel qu'une punaise... Il y en a qui préfèrent la puanteur des égouts... Fort bien, faites déboucher le caniveau ! Moi, j'aime mieux de la poudre à la maréchale sur un sein blanc. A moi le sein." (pages 283-284).
Et toujours du dilettantisme de la part de nos amis, Carlos et Ega.
"
Quel esprit original ne s'étiolerait en voyant autour de lui cette épaisse masse de bourgeois somnolents et obtus, pleins de mépris pour l'intelligence, incapables de s'intéresser à une idée noble, à une phrase bien faite ?
- Cela ne vaut pas la peine, monsieur Afonso da Maia. Dans ce pays, au milieu de la prodigieuse imbécillité nationale, l'homme de bon sens et de goût doit se borner à planter consciencieusement ses choux.
" (pages 428-429).
Et l'on parlait déjà d'une menace bien contemporaine, celle de l'uniformisation :
"
Avec la manie française et bourgeoise de réduire toutes les régions et toutes les races au même type de civilisation, le monde va devenir d'une monotonie abominable. Bientôt un touriste fera d'énormes sacrifices, des dépenses sans fin, pour aller à Tombouctou? Et pourquoi ? Pour y trouver des nègres en chapeau haut-de-forme en train de lire le Journal des Débats !" (page 436).

On trouve quelques petites fautes, surtout dans la deuxième moitié du roman ("Dis-mois", page 430, "bien sût", page 505), et une phrase rigolote : on parle d'une couturière, et l'on peut lire : "Et de fil en aiguille, ..." Ha ha. Il a bien de l'humour, le traducteur !

Bien sûr, il y a quelques conventions romanesques, notamment vers la fin, lorsque nos amis font le bilan de qui est devenu quoi, comme s'ils ne pouvaient pas se l'être écrit plus tôt... Et il y a le drame que l'on pressent...
Mais les Maia, c'est un chef-d'oeuvre de la littérature, avec de nombreux personnages typés, vivants, un roman puissant, vaste, drôle et tragique, avec un arrière-goût amer et nostalgique... la fin d'une civilisation, la confrontation des ambitions de la jeunesse avec la réalité de la vie...




- Retour à la page Littérature Portugaise -

Toute question, remarque, suggestion est la bienvenue.MAILBOX.GIF (1062 octets)