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Jørn RIEL

(Odense, Danemark, 23/07/1931 - )

Jorn Riel

"Jørn Riel s'est engagé en 1950 dans une expédition scientifique (Lauge koche) pour le nord-est du Groenland, où il passera seize années, notamment sur une base d'étude de l'île d'Ella.
De ce séjour, il tirera le versant arctique de son œuvre littéraire, dont la dizaine de volumes humoristiques des Racontars arctiques, ou la trilogie Le Chant pour celui qui désire vivre. Dans ces romans, dédiés à son ami Paul-Émile Victor, Jørn Riel s'attache à raconter la vie des populations du Groenland.

Il reçoit en 2010 le Grand Prix de l'Académie danoise pour l'ensemble de son œuvre.

Il vit actuellement en Malaisie à la lisière d'une forêt près de Kuala-Lumpur
." (merci Wikipedia)


une vie de racontars

- Une Vie de racontars (Flere skrøner fra et rejseliv, 1991, traduit en 2012 par Hervé Tanquerelle). Gaïa.139 pages.
"Quand je me suis assis pour écrire ces quelques épisodes autobiographiques, j'ai compris que ce serait sous la forme de racontars. Pas seulement parce que cette forme de récit me vient naturellement, mais aussi parce que je considère ma vie entière comme un long et incroyable racontar." (Préface de Jørn Riel, page 7).

C'est donc avec un grand plaisir que le lecteur qui a déjà lu tous les racontars de l'auteur - ces fameuses et incroyables nouvelles, qui commencent avec l'excellent recueil La vierge froide, se poursuivent avec Un Safari arctique, puis La passion de Fjordur (ah ! la fameuse passion de Fjordur !), etc., et se finissent avec Le Naufrage de la Vesle Mari - retrouve le Groenland et la forme courte et humoristique que Jorn Rien réussit si bien.
Ici, ses histoires sont encore plus véridiques que d'habitude : ce n'est pas parce que tout n'est pas totalement vrai dans le détail que l'histoire elle-même n'est pas vraie...

Il commence bien avant son arrivée au Groenland.

"L'envie de voyager me vint tôt. Elle est née de la personne remarquable que fut mon père, et de ses masques africains. Pendant la guerre, quand les frontières de mon Danemark natal étaient fermées, il restait assis derrière sa table de chêne et taillait résolument son désir de voyage dans le bois. Un pied de chaise devenait une mince fille du Nil aux longues jambes, une branche de frêne se muait en figure anthropomorphe aux contours anguleux implorant la pluie. Quand il jeta son dévolu sur le chambranle de la porte à coucher, celui-ci se transforma en portail du palace du roi ashanti Saïï Tutu Quamas au Ghana.
Puis vint la période des masques.
" (page 9).
A neuf ans, avec un copain, il décide d'aller en Afrique.
"En plus de mon équipement tropical, j'avais amené deux masques de fertilité Ibo. Ils devaient nous permettre de rester incognito en cas de rencontre dans le fjord avec les pêcheurs de Bregnør." (page 13).

Plus tard :
"Ma première année de lycée se déroula plus ou moins comme la famille s'y attendait : je fus expulsé. J'abandonnai donc l'idée d'une carrière académique, sans réel regret. J'avais d'autres plans, beaucoup plus séduisants." (page 33).

Après quelques aventures assez rocambolesques, c'est le départ pour le Groenland, et le lecteur se retrouve en terrain de connaissance : les longues périodes de solitude, les chiens, le froid, le fameux "vertigo" qui menace (surtout au retour du soleil, au printemps), le mystérieux "courrier kamik" et les visites de courtoisie aux voisins :
"Au menu, il y eut du rôti de boeuf musqué et un rhum fait maison, dont la teneur en alcool était si forte que Bjørgdal tenait la main au-dessus de son verre chaque fois qu'il allumait sa pipe." (page 54).

Riel donnerait presque envie d'aller dans le Grand Nord en hiver :
"C'était le mois de novembre, et l'obscurité s'était déposée sur le nord du Groenland. Le temps de l'obscurité est un moment délicieux, une fois qu'on s'y est habitué. On fait tout avec une inébranlable bomme conscience. On mange souvent et beaucoup, parce qu'il fait froid et que le corps a besoin d'énergie et de graisse. On dort beaucoup, étant donné que c'est la nuit tout le temps et qu'il est déraisonnable de se lever en pleine nuit, même le jour. On travaille le moins possible, et seulement quand l'envie et les circonstances sont réunies." (pages 57-58).


Il faut savoir se débrouiller seul. Mais, parfois, on doit faire appel aux compétences de ses voisins (à condition de pouvoir parvenir jusqu'à eux, bien sûr).
"Il se trouve qu'avant mon départ pour le sauvage Nord-Est du Groenland, j'avais fait une formation de trois mois en médecine, après laquelle j'étais censé pouvoir exercer en tant que charlatan officiel auprès des membres de l'expédition et autres résidents du districts.
Au fil des ans et des expérimentations sur un grand nombre de malchanceux, j'ai acquis une certaine expérience ainsi que l'intime conviction d'être totalement inapte à ce genre d'ouvrage.
" (page 65)

Et quel plaisir de retrouver le fameux boeuf musqué du Groenland !
"De ce que je sais, rien n'est meilleur que la viande de la cuisse d'un jeune boeuf musqué. C'est sombre, tendre et d'une saveur indescriptible, quelque part entre l'agneau et le boeuf.
Les nombreuses et inquiétantes histoires dont on m'avait abreuvé à propos des ours polaires ne s'appliquaient pas aux boeufs musqué. C'étaient des créatures calmes et un peu simples, qui se laissaient abattre gentiment à n'importe quel moment de l'année. [...] Et quand on abattait un membre d'un troupeau, les autres ne s'en formalisaient pas plus que ça. Ils reniflaient avec curiosité leur camarade mort, lançaient quelques regards surpris aux chasseurs, puis reprenaient leur passionnantes activités.
" (pages 89-90).

Une petite remarque sur la quintessence de la vie arctique :
"La vie en Arctique est unique en cela qu'on peut consacrer tout son intérêt à chaque impression, contrairement à notre culture où il faut choisir et répartir son attention, parce que l'offre est si importante." (page 97).

J'imagine bien que ça doit être très vrai.

Autre grand sujet : l'alcool.
L'alcoolisme ne touche pas que nos amis humains. Voici un "chien d'intérieur", M. Mortensen :
"M. Mortensen était alcoolique. Aucune cure ne marchait sur lui. Il aimait surtout le bourbon, et chouinait chaque soir misérablement jusqu'à ce que son Dimple 6 ans d'âge soit servi dans sa gamelle." (page 123).
A mon avis, ça n'est pas un bourbon, mais un whisky.


Ce sont donc des histoires très sympathiques, qui forment la trame de la vie de Riel jusqu'à son départ du Groenland. Conformément aux habitudes Inuit, il raconte volontiers les moments agréables, et passe tant que faire se peu sous silence les moment tristes.
Il est quand même préférabble de lire d'abord les Racontars arctiques, qui relèvent plus de l'histoire bien construite que les fragments de mémoires que nous avons ici. De plus, on comprendra mieux certains aspects qui sont évoqués, notamment l'effet du vertigo.

Le deuxième volume, qui devrait paraître un jour (je crois que l'éditeur a coupé en deux ce qui n'étiat qu'un seul livre en danois), devrait raconter ses aventures en Malaisie, où il est parti décongeler.

 

Le garçon qui voulait devenir un Etre Humain
Photographié à Copenhague, Ville libre de Christiania, le 17/05/2013.

- Le Garçon qui voulait devenir un Etre Humain. (Drengen som ville vaere menneske, 1979). Traduit du danois en 2009 par Susanne Juul et Bernard Saint Bonnet. Gaïa. 257 pages.

À la suite de quelques aventures, Leiv, un jeune garçon viking, se retrouve au Groenland, naufragé, seul et en piteux état. Nous sommes vers l'an 1000.
Leiv va être sauvé par deux enfants Inuits : une fille de onze ans, Narua, et un garçon de douze ans, Apuluk.
Leiv devra se faire accepter de la petite communauté, jusqu'à devenir un Etre Humain, bref : un vrai Inuit...
Ou bien voudra-t-il repartir ?

On suivra plusieurs histoires qui permettront de découvrir la vie inuite (ah, l'accord de "inuit"... tout un problème qui évolue au gré des réformes). C'est parfois un petit peu didactique, les morales un petit peu appuyées (alors que, dans les Racontars arctiques, les morales sont implicites) : respect de la différence, tolérance, etc. Les enfants étant bien sûr plus ouverts d'esprit que les adultes.

Comme on le lit sur la liste des livres de l'auteur sur wikipedia, version danoise, il s'agit d'un børnebog. Et c'est bien cela : un livre pour enfants (ou plus généralement "la jeunesse", adolescents).

Donc, même s'il ne s'agit pas du meilleur Riel pour un lecteur adulte, le livre reste très plaisant. On découvre les préférences culinaires des Inuits :
"Apuluk avait apporté sa lance à oiseaux et une fronde en cuir. Narua portait un gros sac en boyau pour transporter les oiseaux capturés.
Les Inuits adoraient les eiders mâles. La petite boule de graisse qui pousse sur leur tête était particulièrement savoureuse. On préférait la déguster crue, aussitôt l'oiseau capturé.
" (page 38).

Et puis on a des détails pratiques :
"Narua lui confectionna une paire de kamiks, et des moufles qui avaient deux pouces à chaque main, un en haut et un en bas, ce qui était très pratique quand il fallait les enfiler rapidement." (page 48)

Comme le livre est à destination de la jeunesse, il y a quelques stéréotypes, les méchants sont très, très méchants, les personnages souvent dessinés à gros traits, et les rebondissements parfois attendus.


Ceci dit, la lecture est très agréable, mais on est loin des histoires loufoques des Racontars arctiques et de La maison de mes pères ou du sérieux réaliste tragique du Jour avant le Lendemain.

 

nartouk

- Nartouk, le garçon qui devint fort. Une histoire écrite par Jørn Riel, traduite du danois par Inès Jorgensen et illustrée par Antoine Ronzon. J'aime Lire n°230, Bayard poche. 47 pages. Dès 7 ans (ouf, ça va).

Nous sommes chez les Inuits du Groenland.
Au début de l'histoire, il fait beau, mais l'hiver pointe : déjà, la lumière baisse. Puis, c'est la neige. On fait des provisions de viande, et on reste dans les maisons. On répare les outils et on raconte des histoires. Normal : il n'y avait pas TF1 là-bas à l'époque de l'histoire, ni Internet.
Un vieux chasseur, Nanatok, se met à parler.
"« Il y a longtemps, il y avait à Sardloq, dans un hameau appelé Agpa, un garçon dont tout le monde se moquait parce qu'il était petit, malingre, et qu'il avait peur de tout. »
Nanatoq parlait si bas que le silence s'était fait dans la maison pour l'écouter.
« Le garçon s'appelait Nartouk. Il avait perdu ses parents et n'avait plus que sa grand-mère, Niniok. Comme elle était vieille, elle ne pouvait plus faire grand-chose, et tous les deux vivaient de la bonté des gens. Ils n'avaient pas de maison, et dormaient chez les uns et les autres.
Dans ce hameau, un homme avait pris le commandement. Il s'appelait Porto et il était méchant et dur.
" (pages 7-8).
Porto est un petit dictateur.
"Il décidait quand quelqu'un devait être mis sur la glace pour mourir parce qu'il ne servait plus à rien." (page 9).
Il est donc craint. Le voici, Porto (illustrations d'Antoine Ronzon)

porto

Un jour, notre petit héros part pêcher. "Il ne pêchait rien et il avait peur que, ce soir-là aussi, sa grand-mère et lui soient obligés d'aller se coucher le ventre vide." (page 10).

A la suite d'un événement inattendu, Porto va piquer une crise contre Nartouk...

Et notre héros est banni, injustement, bien sûr.
banni

Notre héros, petit et malingre, pourra-t-il survivre ? Parviendra-t-il à faire son chemin dans la vie, pourra-t-il retrouver sa grand-mère ?
Les méchants seront-ils punis et les gentils récompensés ? Notre héros comprendra-t-il, tout en triomphant, qu'il faut être modeste et respecter les autres ? Poser des questions, n'est-ce pas déjà un peu y répondre ?

Ce n'est bien sûr pas ce que Riel a écrit de meilleur, mais Nartouk, le garçon qui devint fort (tout un programme) est un petit conte agréable, principalement destiné aux jeunes (dont je fais partie, évidemment).

 


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