Livre.gif (217 octets) Littérature Japonaise Livre.gif (217 octets)



-
dictées

- listes
- liens recommandés


Papillon.gif (252 octets)

-> retour Japon <-

retour
page d'accueil

 


GENYÛ Sôkyû

(28/04/1956-)

genyu sokyu

"Gen’yû Sôkyû est diplômé de littérature chinoise de l'université Keio de Tokyo. Après ses études, il écrit tout en exerçant divers métiers. À 28 ans, il se fait moine bouddhiste. En 2000, il publie L'Arc d'eau, qui est sélectionné pour le prix Akutagawa. En 2001, il reçoit ce prix pour Des fleurs dans les limbes qui fait sensation à cause de la profession de son auteur. Gen’yû Sôkyû est maintenant « père prieur adjoint » au temple Rinzai Zen dans le département de Fukushima. " (Source : jlpp.com, page supprimée depuis).



terres infinies

Au-delà des terres infinies. (Chuin no hana, 2001). Traduit du japonais par Corinne Quentin. 118 pages. Editions Philippe-Picquier.
Ce roman a reçu le prix Akutagawa en 2001 (ce qui ne figure nulle part sur le livre, bizarre...).
Le titre original est donc Des fleurs dans les limbes.

Le principal protagoniste de l'histoire, Sokudô, est moine zen. Il a pris la suite de son père et s'occupe d'un temple d'une petite ville. Sa femme, Keiko, vient d'une grande ville.
"Née et élevée dans un quartier animé d'Ôsaka, Keiko trouvait sans aucun doute passablement rustre la vie quotidienne dans une petite ville de vingt mille habitants, perdue au milieu des montagnes. Au début, lorsqu'elle répondait au téléphone, il lui arrivait souvent de ne pas comprendre le patois si particulier au sud de la région du Tôhoku." (page 15).
Six ans se sont écoulés depuis son arrivée. Elle aide son mari dans ses tâches, notamment en s'occupant des fidèles lors des cérémonies diverses.
"Keiko se disait à peu près satisfaite de cette vie, mais Sokudô avait le sentiment qu'elle prenait un peu trop sur elle. Elle était plus menue et petite que la moyenne et il lui semblait qu'elle avait tendance à dépasser ses capacités. Sokudô craignait parfois qu'elle finisse par craquer, tant physiquement que moralement. Il aurait eu du mal à expliquer pourquoi mais, par exemple, il était inquiet de la voir, depuis plus de quatre ans, conserver les emballages des cadeaux reçus au temple, les couper en fines lamelles et en faire des tresses." (page 16).
"Quand ils n'étaient que tous les deux, Keiko reprenait son accent d'Ôsaka et Sokudô, qui avait vécu plus de dix ans à Tôykô, parlait dans une langue se rapprochant à peu près du japonais standard d'où émergeait parfois une expression propreà Ôsaka, ce qui les faisait rire tant l'un que l'autre." (pages 17-18).

Le roman, c'est vraiment cela : un entre-deux, ou une tentative de rapprochement de deux mondes, de plusieurs conceptions qui semblent s'exclure. Tradition et modernité, par exemple : c'est un cliché, bien sûr, mais pour le coup, c'est vrai... Ainsi, après un décès, le mort n'est définitivement dans l'au-delà qu'au bout du quarante-neuvième jour. Eh bien, on peut lire ceci, page 30 (Sokudô parle à sa femme) :
"- On dit que le paradis bouddhiste, la Terre pure, se trouve « au-delà des dix milliards de terres ». Il y a des gens qui ont calculé cette distance. Ils ont essayé d'évaluer à quelle vitesse il faudrait la parcourir pour arriver au but en quarante-neuf jours.
- C'est vrai ?
- Oui. Et à ton avis, cette vitesse correspond à quoi ?
- Je n'en ai aucune idée !
- 300 000 kilomètres à la seconde.
- Hein ?
- Ce qui correspond à la vitesse de la lumière ! Sept fois et demie le tour de la Terre en une seconde.
- C'est un peu trop beau, non ?
- Pourquoi ? C'est bien ce qui est beau !
"
Mais il n'y a pas que l'astronomie à passer à la moulinette Zen, la physique des particules y a droit aussi !
Notre moine fait aussi des recherches sur Internet... bref, il vit avec son temps.

Il y a donc une tentative de rapprochement entre la science et le Zen, mais également (et c'est plus le sujet du livre) une étude (enfin, c'est un bien grand mot) des relations entre le Zen et les croyances populaires.

Ainsi, le déclencheur de l'histoire est Mme Ume, une femme voyante, qui a annoncé le jour de son décès...
Lorsque Sokudô se réveille, au début du roman : "Il se demanda si Mme Ume allait effectivement mourir dans la journée, comme elle l'avait annoncé. Sa première prédiction pour le 9 mai ne s'était heureusement pas réalisée, mais après qu'on l'eût ranimée, elle avait de nouveau proclamé qu'elle mourrait le 29 du même mois. C'est-à-dire aujourd'hui." (page 7). Cette prédiction ratée, de la part d'une voyante... comment dire... très compétente, est assez perturbante...
Le surnaturel et la religion sont au centre du roman. A propos de Sokudô : "Pour lui, le zen était une philosophie de la vie quotidienne extrêmement concrète. Pourtant, les gens semblaient souvent attendre, non seulement du zen mais de la religion en général, une « gestion du surnaturel »." (page 62). C'est cette gestion du surnaturel qui est fournie par les croyances populaires.


Un bon mais court roman, vraiment intéressant (d'autant plus qu'il est écrit par un vrai moine Zen), dans la catégorie qui ne met pas tous les points sur les "i". La meilleure des catégories.

Des notes, très bienvenues, expliquent des subtilités intraduisibles, ou bien des détails du bouddhisme.

vers la lumière

Vers la lumière. (Amitabha, 2003). Traduit du japonais par Corinne Quentin en 2010. 168 pages. Editions Philippe-Picquier.
C'est le début du roman :
"Tout a commencé vers le milieu du mois de mai.
Des hommes, une dizaine, étaient alignés, debout, me tournant le dos. Il me semble qu'ils portaient tous le même costume. Je ne sais pas pourquoi, je tirais sur la manche droite de l'un d'eux.
" (page 5). L'homme tombe, sans la moindre résistance. C'est un rêve.
"- Maman, tout va bien. Ne t'inquiète pas, nous sommes à l'hôpital !
Je vois le tuyau vert d'un inhalateur d'oxygène enfoncé dans mon nez.
" (pages 5-6).
La fille de la narratrice est mariée à un bonze, Jiun. Tout ce petit monde s'entend bien.

"Je sais que j'ai un cancer du foie." (page 7). Là, c'est la narratrice qui parle. Elle a quatre-vingt ans.
"[...] je ne peux pas m'imaginer mourir, [...] je ne peux pas me représenter ma conscience disparue." (page 14).
Le cancer progresse.
"A la fin du mois de mai, je n'arrive plus à me lever de mon lit et j'ai l'impression que mes rêves deviennent de plus en plus complexes. Les phénomènes étranges commencent aussi à se produire à peu près à ce moment-là. C'est parce que je ne peux pas me lever, ou plutôt parce que je sommeille à longueur de journée, que je fais toutes sortes de rêves en pointillés. Comme le dit Jiun, mon désir d'unité s'est sans doute affaibli." (page 42).
Elle voit apparaître son mari défunt. Elle se voit, aussi. C'est étrange. "Non, ce doit être autre chose qu'un phénomène autoscopique" dit Jiun en page 45, avant d'embrayer sur des théories impliquant les molécules.
En effet, comme dans le précédent livre de Genyû Sôkyû, Au-delà des terres infinies, il y a ici un mélange de religions et de science.
Le titre original du roman, Amitabha, est expliqué : "C'est-à-dire la lumière infinie. [...] Le paradis serait un lieu accompli par une volonté ou conscience impénétrable pour nous. Et c'est de cela qu'il ne faut pas douter." (page 67).


Dans la chambre d'hôpital de la narratrice, ça papote beaucoup (trop, en fait... c'est parfois un peu long), et surtout religion et science, poids de l'âme perdu à la mort (au sujet de quoi on pensera au film 21 grammes, de González Iñárritu), conversion de la matière en énergie...
On lit par exemple :
"Dans la bouddhisme, on dit que l'avènement de Maitreya interviendra dans cinq milliards six cent soixante-dix millions d'années, mais ça non plus, ça n'arrivera pas.
- Et pourquoi donc ?
- Parce que, bien que ce soit sans doute un calcul approximatif, on évalue la durée de vie qui resterait à la Terre à environ cinq milliards deux cents millions d'années.
" (page 94).
Et ça parle de E=MC2, du tremblement de Terre que le Christ a pu faire grâce à son énergie, consécutive à la perte de matière, matière convertie en énergie...
On parle de religion en général :
"Je ne sais pas, mais moi, je pense que faire attendre un jour qui ne viendra pas, c'est une constante dans les religions." (page 94). Bref, c'est très libre, personne n'est dogmatique.


Le lecteur non japonais apprendra des choses étranges sur le fonctionnement de la société japonaise. Tomio est le fils de la famille. Tout marchait bien pour son entreprise jusqu'au tremblement de terre de Kôbé.
"Bien qu'il se soit déclaré en faillite et ait déposé le bilan de son entreprise, légalement, Tomio peut bénéficier d'une couverture sociale mais à condition de ne pas se rendre chez ses créanciers ni leur écrire pour leur présenter ses excuses. Or, comme cela ne lui convenait pas, il est quand même allé présenter ses excuses à quelqu'un et a été accueilli avec des mots plutôt violents : « Je pensais que vous seriez plus mal habillé que ça ! »
Voulant être présentable, il avait mis un costume, plutôt que ses vêtements de tous les jours, et on l'a même plaisanté sur le fait qu'il s'était rasé. « Vous ne pourriez pas être un peu plus débraillé ? » [...]
A la différence de ce qui se passait autrefois, il n'a pas perdu son droit de vote et il lui est possible d'obtenir un passeport. Tomio dit qu'il lui est arrivé de ressentir une certaine rancoeur envers la loi qui donnait l'impression d'une trop grande protection.
- C'est vrai que ceux qui ont prêté de l'argent ne sont pas protégés, eux. Je les comprends un peu.
" (pages 83-84).
Tomio se met à suivre des cours de catéchisme. Ce qui lui permet de se mêler à la discussion dans la chambre d'hôpital, et d'apporter des histoires tirées de la Bible.

Pendant que ça papote, la narratrice suit plus ou moins ce qui se dit, mais au fur et à mesure que le livre avance, elle perd la notion du temps, des enchaînements, le passé lui revient, elle ne sait plus où elle est. "Divers moments, divers moi m'apparaissent entremêlés. [...] Mes pensées font des sauts, se mélangent, c'est très riche. Ce temps complexe, impossible à définir, m'apparaît comme coincé dans la monotone platitude de la réalité." (page 99).

Elle va cheminer vers la lumière, comme le dit le titre du roman.

Un livre pas inintéressant, mais souvent un peu long (les conversations dans la chambre d'hôpital...). On retrouve le mélange religion/science de Au-delà des terres infinies, mais Vers la Lumière est quand même moins bon.

 


Film d'après son oeuvre :
- Aburakurasu no matsuri (2010). Réalisé par Naoki Katô. Il s'agit de l'histoire d'un moine bouddhiste, ancien rocker..
aburakurasu

 


- Retour à la page Littérature japonaise -

 

Toutequestion, remarque, suggestion est la bienvenue.MAILBOX.GIF (1062 octets)