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PERUTZ Leo
(Prague, 02/11/1882 - Bad Ischl, Haute Autriche, 27/08/1957)

 
leo perutz

 

Leo Perutz est né dans l'Empire Austro-Hongrois. Il était mathématicien, et a travaillé sur le calcul des probabilités.
1907 : pendant quelque temps, il travaille dans la même compagnie d'assurances que Franz Kafka.
1914 : c'est la guerre, Leo Perutz est blessé sur le front de l'est. "Il est opéré, à sa demande, sans anesthésie, et jette les deux côtes qu'on lui enlève à un chien, qui n'y touche pas." (source : Wikipedia). "Le lieutenant Peruzt est ravi. Il a la preuve que les chiens ne sont pas des animaux morbides. Au contraire, leur présence chasse l'odeur de la Faucheuse." (Linda Lê, notice préalable à Où roules-tu petite pomme ?)
Puis, c'est la publication de La Troisième Balle (1915) , et Le Maître du Jugement Dernier (1923), Le Marquis de Bolibar (1920), Où roules-tu, petite pomme ? (1928), puis son chef-d'oeuvre : Le Cavalier Suédois (1936).
Leo Perutz a de gros problèmes financiers, sa femme meurt, il se remarie...
Les nazis arrivent au pouvoir, Perutz fuit : il est d'origine juive. Il s'installe à Tel-Aviv, retravaille comme actuaire... et n'écrit plus rien, jusqu'en 1953, où paraît La nuit sous le pont de pierre (un ensemble de nouvelles), et Le Le Judas de Léonard (1959).

Il n'est pas (encore) très connu en France.
Cela vient...


le cavalier suédois
En couverture : Rembrandt - Autoportrait en jeune homme (détail). Galerie des Offices, Florence.

- Le Cavalier suédois (der schwedische Reiter, traduit en 1987 par Marine Keyser. Phébus Libretto). 275 pages.

Le livre commence par un prologue, écrit de manière historico-objective.

"Maria Christine, née von Ternofeld, veuve von Rantzau, épouse en secondes noces de Reinhold Michael von Blohme, conseiller d'Etat à la cour de Danemark et ambassadeur extraordinaire, fut en sa jeunesse une beauté très entourée. Elle avait cinquante ans lorsqu'elle écrivit ses mémoires, vers le milieu du XVIII° siècle." (page 17).

Tant de détails ne peuvent qu'ancrer le récit dans la réalité.

Mais il y a tout de suite des événements curieux, fantastiques : lorsque Marie Christine était petite, son père était parti à la guerre, on entendait parler de ses exploits lointains... et dans le même temps il revenait, la nuit, voir sa fille et lui parler à voix basse.
Etrange... et puis on apprend sa mort, et il cesse de venir la voir. Fantôme, spectre... avant même qu'il ne soit trépassé au champ d'Honneur ?

Puis le roman lui-même commence, et le style change avec l'entrée en scène de deux personnages "pivots".

"Ils s'étaient tenus cachés tout le jour et, à présent qu'il faisait nuit, ils traversaient une forêt de pins clairsemés. Les deux hommes, qu avaient de bonnes raisons d'éviter les rencontres, devaient veiller à ne pas être vus. L'un était un vagabond, un maraudeur de foire réchappé du gibet, l'autre un déserteur." (page 27).

"Il faisait jour lorsqu'ils quittèrent la forêt. Une mince couche de neige soulignait les champs, les prés et les friches. Des coqs de bruyère volaient dans la lumière blême de l'aube. Ici et là, un bouleau solitaire dont la bourrasque emmêlait les branches. A l'est s'étirait le mur blanc du brouillard : il palpitait, ondoyait, engloutissant les villages, les fermes, les langes, les forêts et les champs." (page 29).

Les deux compères arrivent ainsi à un étrange moulin et font la rencontre du meunier... ou bien du spectre du meunier ?
A partir de là des nombreuses aventures arrivent à notre héros, et ce serait bien dommage d'en parler.

L'histoire (pleine de voleurs, cavaliers, pactes, spectres, destin, Dieu, vie volée...) est ultra accrocheuse et en même temps remarquablement bien construite, avec un sens de la destinée tragique qui éclaire des détails du début qui avaient pu paraître curieux, ou bien même que l'on n'avait pas particulièrement remarqués.

Dans ce roman, le fantastique peut s'expliquer rationnellement, et le rationnel relever du fantastique ; la frontière entre la réalité et le surnaturel est fluctuante, pas toujours sûre. Tout s'éclaire vers la fin.
Mais il reste néanmoins un substrat pas catholique là-dedans. Voilà un livre dont la fin ne déçoit pas et qui, au contraire, en relève encore le niveau.
C'est très rare.

bolibar
Le Marquis de Bolibar à Prague, le 22 août 2009.

La couverture montre Jour de pluie à Grenade, d'Antonio Muñoz Degrain (1840-1924), Musée du Prado, Madrid :
degrain

Le Marquis de Bolibar (Der Marques de Bolibar, 1920). Traduit de l'allemand par Odon Niox Chateau en 1930. Préface de Roland Stragliati. Le Livre de poche-Biblio, 220 pages.
Ce livre est qualifié de chef-d'oeuvre, "l'un des grands textes de la littérature fantastique contemporaine", dit l'introduction de Roland Stragliati.
Il est effectivement souvent considéré comme la meilleure oeuvre de Leo Perutz.

Le roman commence par un avant-propos (qui fait partie intégrante du livre, bien sûr ; il est destiné à ancrer plus encore l'histoire dans le réel) : "Peu de temps avant la guerre franco-allemande mourut à Dillenburg, petite ville de l'ancien duché de Nassau, un gentilhomme, propriétaire foncier, du nom d'Edouard de Jochberg. [...]
Aucune des rares personnes qui étaient admises près de lui, ses chiens de chasse et ses chevaux représentant ses compagnons habituels, ne savait que M. de Jochberg était un vieux soldat qui, aux temps de sa jeunesse, avait vécu une partie des campagnes de Napoléon Ier.
" (page 9).
Edouard de Jochberg laisse des Mémoires.
"Ces Mémoires jetaient, en effet, une vive clarté sur un chapitre encore très obscur de l'histoire nationale : à savoir, la destruction totale par des guérillas espagnoles des deux régiments de Nassau et du Pince hériter de Hesse." (page 10).
Eh oui, des provinces de Prusse avaient aidé l'armée Napoléonienne contre l'Espagne... la situation n'est pas très simple.

La page suivante fait monter l'intérêt du lecteur : "Si le récit du lieutenant Jochberg est exact, l'anéantissement du régiment de Nassau, événement dont l'histoire militaire de tous les temps n'offre aucun exemple, a été l'ouvre de ses officiers, oeuvre consciente, dont on peut dire qu'elle fut méthodiquement conduite !" (page 11).

Et l'histoire commence vraiment.
"Vers huit heures, dans la matinée, nous aperçûmes enfin les deux clochers tout blancs de la cité de La Bisbal. Nous étions trempés jusqu'aux os, moi, mes quinze dragons et l'adjudant-major du régiment, le capitaine Eglofstein, qui nous avait suivis pour négocier avec l'alcade.
La veille, notre régiment avait dû soutenir un violent combat avec les guérilas et leur colonel Saracho
[...]" (page 13).
Les troupes s'installent.
Très rapidement, page 17, apparaît le Marquis de Bolibar. C'est un homme bien mystérieux, qui ne veut pas du bien aux troupes pro-Napoléon. Il explique son plan, ou du moins ce qu'il attend d'eux, à une assistance toute acquise à sa cause.
"Cachez vos canons et vos barils de poudre et attendez le moment où nous serons plus forts que les Allemands.
- Et quand sonnera-t-elle, cette heure ? questionna le colonel en secouant la tête d'un air sceptique et en soufflant sur le feu.
- Bientôt, répondit le marquis. Je vous trouverai un allié. Vous aurez un appui dont vous ne pouvez vous faire aujourd'hui aucune idée.
" (page 39).

Le Marquis fait une série de prédictions qui, bien sûr, s'accompliront. Ce n'est pas un scoop, l'anéantissement des régiments est annoncé dès le début. C'est un roman original, à cause des pages 45-46, on se pince, est-ce qu'on a bien lu ? eh oui....
Mais après... Le problème du texte est que l'on sait que les prédictions vont s'accomplir. Bien sûr, on ne sait pas comment, on sait juste que cela va être tordu, un peu comme un Destination Finale (le film de James Wong, 2000, et les suites), toutes proportion gardées, bien sûr.

Contrairement au Cavalier Suédois, où l'histoire est remarquablement amenée, ici il arrive "juste" ce qui doit survenir, même si l'on ne sait pas tout à fait comment. Il y a un côté mécanique un poil lassant (à quoi bon chercher à deviner comment ce qui doit arriver va arriver ?).

Le Cavalier Suédois
est très nettement supérieur au Marquis de Bolibar, désolé.

 

Où roules-tu, petite pomme ?
Photographié dans le cloître de l'Eglise Saint-Pierre-et-Saint-Paul, à Souvigny, le samedi 13 octobre 2012.


La couverture reproduit un autoportrait de Kupka : L'Echelle Jaune (1907). Museum of Fine Arts, Houston, Texas.
Kupka

- Où roules-tu, petite pomme ? (Wohin rollst du, Äpfelchen..., 1928).Traduit de l'allemand par Jean-Claude Capèle en 1989. Le Livre de poche. 247 pages.

Au début du livre, une notice signée Linda Lê explique que Leo Perutz, qui était sur le front russe pendant la Première Guerre Mondiale, en a rapporté le refrain d'une chanson populaire : "Où roules-tu, petite pomme ? Tu vas tomber dans l'eau..."

Au début de l'histoire - publié en roman-feuilleton en 1928 - , un groupe d'hommes quitte un hôpital militaire.
Nous ne savons rien d'eux.
Ils prennent le train.
"Vittorin sortit son calepin et demande leurs adresses à ses compagnons de voyage qui avaient été deux ans durant ses camarades de chambrée au camp de Tchernaviensk. [...]
Le premier pas était franchi. Il avait tout noté noir sur blanc. Face à Mikhaïl Mikaïlovitch Sélioukov, il y avait à présent une organisation soudée, une alliance de cinq hommes qui voyaient clairement devant eux leur objectif et étaient prêts à n'importe quel sacrifice pour l'atteindre. Il fallait dorénavant laisser les choses suivre leur cours.
" (page 15).

On est donc à la fin de la Première Guerre Mondiale. Un groupe d'hommes revient à Vienne après un séjour prolongé dans un camp russe. Ils ont un compte à régler avec un Russe qui, semble-t-il, n'a pas eu un comportement très correct...
Cette vengeance, on le pressent, ne sera pas aisée à accomplir : elle implique de repartir en Russie en des temps troublés. Qui aura le courage et la volonté d'y retourner ?

On retrouve les thèmes favoris de Perutz : le destin, son ironie, ses circonvolutions, sa mécanique ; et la folie, le Mal. On pressent donc que les aventures vont se succéder, les morts s'accumuler...
Où roules-tu... n'a pas l'originalité du Marquis de Bolibar (originalité liée aux pages 45-46), mais il est finalement plus intéressant, car le lecteur ne sait pas où il va, comment l'aventure va finir, et il se laisse ballotter dans des temps incertains.
C'est un bon roman-feuilleton : l'attention du lecteur est constamment maintenue en alerte.
Bien sûr, il est un cran au-dessous du Cavalier Suédois, mais c'est un bon livre tout de même.

 


Autres oeuvres traduites en français :
- La troisième balle (Die dritte Kugel, 1915)
- Le miracle du manguier (Das Mangobaumwunder, écrit avec Paul Frank - un écrivain autrichien -, 1916)
- Le tour du cadran (Zwischen neun and neun, 1918)
- Le maître du jugement dernier, (Der Meister des Jüngsten Tages, 1923)
- Turlupin (Turlupin, 1924)
- Le cosaque et le rossignol (Der Kosak und die Nachtigall, écrit avec Paul Frank, 1927)
- Seigneur, ayez pitié de moi ! (Herr, erbarme Dich meiner, 1930)
- La neige de Saint Pierre (St. Petri Schnee, 1933)
- La nuit sous le pont de pierre (Nachts unter der steinernen Brücke, parution 1953)
- Le Judas de Léonard (Der Judas des Leonardo, parution 1959)
- Nuit de mai à Vienne et autres récits (Mainacht in Wien, parution 1996)



Films d'après son oeuvre :
- Das Abenteuer des Dr. Kircheisen (1921), réalisé par Rudolf Biebrach
- Der Marquis von Bolivar (1922), réalisé par Friedrich Porges
- Die Geburt des Antichrist (1922) ?
- Bolibar (1929), réalisé par Walter Summers
- Der Kosak und die Nachtigall (1935), réalisé par Phil Jutzi
- Historia de una noche (1941), réalisé par Luis Saslavsky (réalisateur Argentini).
- Ceniza al viento (1942), réalisé par Luis Saslavsky
- Historia de una noche (1963), réalisé par Luis Saslavsky, avec notamment Rafael Bardem (le grand-père de Javier Bardem).
- Der Meister des jüngsten Tages (1990), réalisé par Michael Kehlmann
- Tyro (1990), réalisé par Guy Maddin (l'auteur notamment du très curieux The saddest music of the world, 2003)
- St. Petri Schnee (1991), réalisé par Peter Patzak


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