Livre.gif (217 octets) Essais Livre.gif (217 octets)



-
dictées
-
littérature
- listes
- liens recommandés


Papillon.gif (252 octets)

-> retour
Essais
<-


Autre littérature :

Littérature japonaise

retour
page d'accueil

 


Akira MIZUBAYASHI
( 1952 - )


mizubayashi akira

 


"Ecrivain et traducteur japonais, Akira Mizubayashi est né en 1952.
Après des études à l’université nationale des langues et civilisations étrangères de Tokyo (Unalcet), il part pour la France en 1973 et suit à l’université Paul Valéry de Montpellier une formation pédagogique pour devenir professeur de français (langue étrangère). Il revient à Tokyo en 1976, fait une maîtrise de lettres modernes, puis, en 1979 revient en France comme élève de l’Ecole Normale Supérieure.
Depuis 1983, il enseigne le français à Tokyo, successivement à l’université Meiji, à l’Unalcet et, depuis 2006, à l’université Sophia." (source : Babelio)


une langue venue d'ailleurs

Une Langue venue d'ailleurs (2011 ; L'un et l'autre, Gallimard). 269 pages. Préface de Daniel Pennac.

Il s'agit presque d'une autobiographie (écrite en français, s'il faut le préciser).

"Ma mère mit un garçon au monde en août 1951 dans une petite ville de province du nord du Japon. L'enfant arriva aux aurores presque tout seul. C'était moi. Dix-neuf ans plus tard, je commençai à dire mes premeirs mots en français." (page 19).

Mizubayashi explique comment, étouffant dans la langue japonaise, il en est venu à apprendre le français (Mozart, Rousseau...), comment il s'est entraîné à la musicalité de la langue, en écoutant encore et encore des enregistrements de la radio.

"En musique, il y a tous les niveaux, du niveau débutant au professionnel en passant par le niveau amateur. C'est pareil en langues. Le niveau professionnel ne s'acquiert pas en deux ou trois ans. Il faut des années de travail et toute une vie pour l'entretenir... Vous aimez le français. D'accord. Mais qu'est-ce que ça veut dire pour vous, « aimer le français » ? Êtes-vous prêts à faire du français comme pour devenir un vrai musicien ? Pourquoi ces questions ? Parce que je suis moi-même comme un musicien qui s'entraîne tous les jours. La différence entre un musicien et moi, c'est que je suis un instrumentiste sans public. Personne ne s'intéresse à mon jeu, je n'ai pas de répertoire, je n'ai aucun morceau célèbre à jouer devant un auditoire. Ma performance n'est pas une marchandise. Je joue pour moi seul et c'est bien ainsi." (pages 156-157).

A la fin du livre, il écrit :

"Nancy Huston écrit : « L'acquisition d'une deuxième langue annule le caractère naturel de la langue d'origine - à partir de là, plus rien n'est donné d'office, ni dans l'une ni dans l'autre ; plus rien ne vous appartient d'origine, de droit et d'évidence. » Voilà une affirmation qui me va droit au coeur. Le jour où je me suis emparé de la langue française, j'ai en effet perdu le japonais pour toujours dans sa pureté originelle." (page 267)

Mais revenons en arrière. A Tokyo, il tombe sur un livre qui le touche particulièrement, "Jean-Jacques Rousseau : la transparence et l'obstacle", de Jean Starobinski. Le livre est cher, mais il l'achète.
"Pour les livres, je disposais d'un budget illimité, si j'ose dire. Mon père me disait :
- Aucune marchandise n'est meilleur marché, à condition qu'on le lise. Tu achèteras autant de livres que tu voudras, si tu en as besoin et si tu les lis. Rien de plus cher, par contre, qu'un livre, si on ne le lit pas puisqu'on ne peut même pas s'en servir comme papier hygiénique.
" (page 180).
C'est très vrai !


Et puis c'est le grand saut :

"Je n'avais jamais quitté ma famille, je n'étais jamais allé à l'étranger, je n'avais jamais voyagé en avion, je ne m'étais même jamais éloigné durablement de Tokyo. Aller à Montpellier, cela représentait pour moi un véritable exil, mais un exil voulu, nécessaire." (page 90). On est en octobre 1973. Les voyages n'ont pas encore été banalisés comme maintenant.

Il raconte son arrivée à Montpellier, la fac, ses professeurs, ses boulettes en français, les étrangetés de chez nous.
Il est frappé par un fait banal chez nous : "Dans les boulangeries, les bureaux de tabac ou dans d'autres petits commerces, je fus frappé par le fait que des hommes (et, moins souvent, des femmes) entraient dans la boutique en disant à la cantonade « Bonjour, messieurs-dames », ou tout simplement « bonjour », ou encore succinctement « Messieurs-dames ». Saluer des personnes inconnues ? Eh oui, cela est fréquent en France [...]. Tandis que dans mon pays, un tel geste, potentiellement créateur de liens, serait perçu comme une violence inacceptable ou tout au moins comme une incongruité suspecte. [...] Les inconnus sont par définition suspects." (page 169).

Il se marie avec une Française, et on voit comment il tente de résoudre le problème du bilinguisme pour l'éducation de leur fille : avec elle, chacun parle sa langue.

A un moment (page 230), il dit qu'il est double, et on pense à ce que le livre pourrait être : une longue interview de l'auteur par Bernard Pivot, dans la série Double Je.

On notera qu'il parle très gentiment de Daniel Pennac (page 237, page 250 "de Zola à Pennac en passant par Céline")... qui a écrit la préface. Je ne sais pas si Pennac apparaissait dans le livre avant que Pennac ne rédige la préface, cela dit.

Le livre de Mizubayashi Akira parle donc de sa vie, de l'acquisition d'une langue, des différences culturelles profondes entre le Japon et la France, mais aussi de Rousseau, Mozart, Stendhal, Arimasa Mori, Gérard Genette, Jean-Pierre Richard, Roland Barthes...

Et c'est franchement très intéressant.

Ecoutons-le :

 

 

 



- Retour à la page des Essais -

Toute question, remarque, suggestion est la bienvenue.MAILBOX.GIF (1062 octets)