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John Maxwell COETZEE

(Le Cap, Afrique du Sud, 09/02/1940 - )


coetzee

"Coetzee naît au Cap dans une famille boer (colons afrikaners). Son père est avocat et sa mère institutrice. L'anglais est sa langue maternelle. Il suit sa scolarité dans une école anglophone. Initialement, il ne poursuit aucun cursus universitaire dans les lettres et étudie les mathématiques à l'université du Cap. En 1960, il part pour l'Angleterre et poursuit à Londres des études de linguistique et d'informatique.

Après avoir travaillé comme programmeur pour IBM et International Computers, Coetzee nourrit des ambitions littéraires. Toutefois, il est tiraillé entre ses besoins financiers et sa passion pour les lettres et l'écriture. L'attribution d'une bourse d'étude lui permet de reprendre des études d'anglais à l'université du Texas à Austin, où il soutient une thèse de doctorat en 1965 sur les romans de Samuel Beckett. Il se voit ensuite proposer un poste à l'université de Buffalo (New York) où il enseigne jusqu'en 1971. L'année suivante, il obtient une chaire de professeur en littérature au département d'anglais de l'université du Cap. Son premier roman, Terres de crépuscule (Dusklands), y est publié en 1974.

Coetzee s'installe en Australie en 2002 pour enseigner à l'université d'Adélaïde. Il est maintenant professeur émérite à l'université de Chicago (Illinois), aux États-Unis.

L'auteur a reçu de nombreux prix littéraires de première importance : il est le premier écrivain, et à ce jour encore le seul, avec l'Australien Peter Carey et la Britannique Hilary Mantel à obtenir deux fois le prestigieux Prix Booker, en 1983 pour Michael K, sa vie, son temps (Life and Times of Michael K) et en 1999 pour Disgrâce (Disgrace). La plus prestigieuse récompense internationale, le prix Nobel de littérature, vient couronner en 2003 une œuvre « qui, dans de multiples travestissements, expose la complicité déconcertante de l’aliénation. »

En 1963, Coetzee avait épousé Philippa Jubber avec laquelle il a eu deux enfants : Nicolas (né en 1966) et Gisela (née en 1968). Le couple a divorcé en 1980. Son fils Nicolas est décédé, en 1989, des suites d'un accident.

Le 6 mars 2006, Coetzee obtient la nationalité australienne." (suite sur Wikipedia)



disgrace

Disgrâce (Disgrace, 1999). Traduit de l'anglais en 2001 par Catherine Lauga du Plessis. Points. 273 pages. Booker Prize 1999.

Le personnage principal, David Lurie, est professeur à l'Université.
"Il gagne sa vie à l'Université technique du Cap, qui faisait naguère partie du Collège universitaire du Cap, où il avait une chaire de langues modernes. Mais à la suite des mesures de rationalisation et de la fermeture du département de langues classiques et modernes, il se retrouve professeur associé en communications. Comme tous les enseignants touchés par la rationalisation, il lui est permis d'enseigner un cours par an dans sa spécialité, quel que soit le nombre des inscrits, parce qu'on a souci de soutenir le moral du corps enseignant. [...]
Bien qu'il consacre chaque jour des heures à sa nouvelle discipline, il trouve que le principe sur lequel elle repose, tel qu'il est exprimé dans la brochure de Communications 101, est ridicule : « La société humaine a créé le langage pour nous permettre de communiquer nos pensées, nos sentiments et nos intentions les uns aux autres. » À son avis, qu'il se garde bien d'exprimer en public, la parole trouve son origine dans le chant, et le chant est né du besoin de remplir de son l'âme humaine, trop vaste et plutôt vide.
" (page 10).

Il a publié trois livres qui sont passés inaperçus (Boïto et la Légende de Faust : la Genèse de Méphistophélès ; une étude de la vision comme principe érotique ; les rapports de Wordsworth avec l'histoire...).

Ecoutons, de Arrigo Boito (surtout connu comme librettiste pour Verdi ou Ponchielli - ainsi que pour être le frère de Camillo), le finale de Mefistofele, avec Samuel Ramey :

 


David Lurie est un intellectuel, mais l'enseignement, ça n'est pas son truc. Il a du mal à communiquer avec ses élèves.
"Il continue à enseigner parce que cela lui donne de quoi vivre ; et aussi parce que c'est une leçon d'humilité, cela lui fait comprendre la place qui est la sienne dans le monde. Ce qu'il y a là d'ironique ne lui échappe pas : c'est celui qui enseigne qui apprend la plus âpre des leçons, alors que ceux qui sont là pour apprendre quelque chose n'apprennent rien du tout." (page 12).

Il s'est marié deux fois, et a divorcé deux fois. Il a des aventures par ci, par là, sans difficulté. Il présente bien, c'est un séducteur. Il a cinquante-deux ans.
"Et puis, un beau jour, tout cela prit fin. Sans le moindre signe avant-coureur, le pouvoir de son charme l'abandonna. Ces regards, qui naguère auraient répondu aux siens, glissaient sur lui, se portaient ailleurs, ne le voyaient plus. Du jour au lendemain, il ne fut plus qu'un fantôme. S'il voulait une femme, il devait apprendre à courir après ; et souvent, d'une manière ou d'une autre, l'acheter." (page 15).

"Comme il rentre par le chemin des écoliers un vendredi soir, en passant par les anciens jardins de l'université, il aperçoit l'une de ses étudiantes dans l'allée, un peu devant lui. Elle s'appelle Mélanie Isaacs. Ce n'est pas une fille brillante mais elle n'est pas nulle non plus : pas bête, mais pas motivée." (page 19).

Il la rattrape, l'invite, met de l'ambiance. "Il met un autre disque : les sonates de Scarlatti, un chat qui court sur le clavier" (page 24). C'est joliment dit.
Et il tente sa chance.
"« Ne pars pas. Passe la nuit avec moi. »
Par-dessus le bord de la tasse elle le regarde fixement.
« Pourquoi ?
- C'est ce que tu devrais faire.
- Et pourquoi est-ce que je devrais faire ça ?
- Pourquoi ? Parce que la beauté d'une femme ne lui appartient pas en propre. Cela fait partie de ce qu'elle apporte au monde, comme un don. Elle a le devoir de la partager. »
" (page 25).

Comme toujours (enfin, sans vouloir généraliser, c'est le cas dans Michael K, sa vie, son temps et Elizabeth Costello), les personnages de Coetzee ne sont pas immédiatement sympathiques (et, parfois, ne le sont jamais).

C'est le début de la chute pour David. A moins qu'elle ait commencé avant.
"Le moulin à ragots, se dit-il, tourne jour et nuit et broie les réputations. La communauté des justes tient conciliabule dans les coins, au téléphone, derrière les portes closes, échange de rires étouffés. Schadenfreude. D'abord le verdict, ensuite le procès.
Dans les couloirs du bâtiment des Communications, il s'applique à garder la tête haute.
" (page 56)
Sa deuxième ex-femme le lui dit : "N'attends pas la moindre sympathie de ma part, David, ni de personne d'autre d'ailleurs. De nos jours, il ne faut compter sur la sympathie de personne, c'est un âge sans pardon." (page 58)

C'est en quelque sorte la première partie. La force et la portée du livre viennent du changement de décor et de situation, des parallèles ou oppositions que l'on peut effectuer entre les deux parties. À la violence "policée" de la société du Cap, qui n'apparaît d'ailleurs pas forcément comme telle à ceux qui l'exercent, répond la violence physique exercée loin de toute civilisation, de façon plus immédiatement brutale.

Le livre, écrit de façon distanciée, froide, ne comporte que très peu de descriptions des hommes et des femmes, à tel point que l'on doit deviner la couleur de peau des protagonistes. Exceptionnellement (par exemple page 162 : "ils sont les seuls Blancs"), c'est précisé. On a parfois le terme "Africain" pour désigner les Noirs. Je ne sais pas si ce mot est courant en Afrique du Sud : objectivement, il implique que les Blancs d'Afrique du Sud ne sont pas Africains (donc... quoi ? Européens ?). Cette absence de description physique crée un effet étrange.

En plus d'une réflexion sur la violence (et il y a de quoi écrire sur le sujet, les formes de violence sont multiples dans le livre : violence au nom d'une conception, violence pour marquer un territoire, violence pour le plaisir, et même violence pour "rendre service", si l'on peut considérer ainsi les motivations qui poussent à euthanasier des animaux), d'une réflexion sur la façon dont on y réagit, il y a une réflexion sur la vieillesse, et toutes ses conséquences (physique mais aussi, d'un point de vue "élevé", la baisse de l'inspiration).
Le sens de tout le livre n'est pas immédiatement clair, il mérite une relecture. C'est le problème des livres par rapport aux tableaux : on a immédiatement une vue d'ensemble pour une toile, ce qui n'est pas le cas des livres.

Un livre riche, pas aimable, mais marquant et souvent dur.

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